Forfait Structure : drame en 3 actes

Chronique d’une disparition annoncée.

Acte 1 : parution au JO du 14/08/2019 de l’avenant 7 de la convention, qui décide du basculement en 2022 de l’item « Exercice dans une structure d’exercice coordonné » du volet 2 (items facultatifs) au volet 1 (items obligatoires socle) du Forfait Structure.
Conséquence : pour tous les médecins qui n’exercent pas en ESP, MSP ou PSLA, ou dans le cadre d’une CPTS, ou qui ne participent pas à au moins 4 réunions de RCP formalisées par an, le Forfait Structure 2022 payé en 2023 sera égal à : RIEN.
La FMF a refusé de signer cet avenant.
Et malgré mes avertissements réitérés à ce sujet, ça n’a suscité aucune réaction.

Acte 2 : parution au JO le 22/09/2021 de l’avenant 9, qui réitère le passage au volet 1 de l’item « exercice coordonné » et saupoudre au passage de quelques items d’utilisation des téléservices (prescription de transport et déclaration de grossesse), d’utilisation des fonctions Ségur des logiciels médicaux (alimentation des DMP avec les VMS, utilisation des messageries de santé sécurisées vers le MonEspaceSanté des patients, e-CV, prescription électronique), et de participation au SAS.

La FMF a aussi refusé de signer cet avenant. Et toujours aucune réaction de la base.

Acte 3 : A l’approche de la fin de 2022 tout le monde s’affole en réalisant qu’une bonne moitié des médecins libéraux ne touchera pas du tout de Forfait Structure en 2023 ! mais la CNAM reste « droit dans ses bottes » dans le mode « vous avez signé on applique ».

Épilogue : à la dernière CPN du 06/10/2022 tous les syndicats ont demandé un report d’un an de la mesure (ce qui revient de fait à une annulation puisque normalement l’an prochain les cartes seront rebattues et que nous aurons une nouvelle convention toute neuve et toute belle). Nous sommes en attente de la réponse … et donc on croise les doigts.

En pratique, il semble tout à fait surprenant que M. Fatôme, habituellement fin politique, se tire ainsi une balle dans le pied en restant sur une position dogmatique et de principe.

En effet :

  • La crise COVID (qui au passage a largement démontré la capacité des médecins et des autres professionnels de santé libéraux à travailler de façon coordonnée, même de façon « informelle ») a fortement retardé la mise en place des ESP, PSLA, ou CPTS, que les ARS mettent beaucoup de temps à valider.
  • Priver la moitié des médecins libéraux de leur forfait structure en pleines négociations conventionnelles, alors que les honoraires n’ont pas été revalorisés depuis 7 ans malgré l’inflation, risque de nettement aggraver la grogne des médecins, voire de mettre le feu aux poudres.
  • C’est particulièrement mal venu aussi, alors que la CNAM proclame régulièrement sa préférence pour les rémunérations forfaitaires, contrairement aux syndicats de médecins libéraux, de supprimer ainsi une de ses composantes.
  • Si on n’a plus de forfait structure, pourquoi s’enquiquiner à utiliser des téléservices peu ergonomiques (même si certaines CPAM ont trouvé la parade : ne plus honorer les demandes de CERFA) ? pourquoi alimenter le DMP ? pourquoi investir dans un logiciel labellisé Ségur ?
  • Et même pour les médecins qui auront un forfait structure l’an prochain, les items Ségur ne seront pas remplis, puisque le déploiement a pris au moins 6 mois de retard, le service AATi des arrêts de travail intégrés aux logiciels médicaux a été brutalement interrompu en mai dernier à la suite de la réforme des arrêts de travail, et le SAS a été mis en suspens cet été au profit de la cotation SNP

La CNAM aurait donc tout à gagner à revoir sa position. À moins qu’elle ne souhaite en réalité un affrontement frontal  avec les libéraux ?