Donnez-nous des téléservices qui marchent !

Ces dernières années la CNAM a massivement investi dans les téléservices. Ou du moins a massivement insisté pour que les médecins libéraux s’investissent dedans. Elle a même inscrit leur utilisation dans le volet 2 du Forfait Structure avec des objectifs chiffrés au début très modérés, mais actuellement qui tutoient les sommets. 

Elle a « juste » oublié une chose : il ne suffit pas d’accrocher un joli ver sur l’hameçon, il faut encore qu’il soit appétissant. 
Parce que les téléservices actuellement c’est avant tout du temps gagné pour les CPAM. L’avantage pour elles est évident, mais pour nous médecins libéraux ?

Pour qu’un service ait du succès, il faut qu’il soit simple, intuitif, ergonomique et fasse gagner du temps à ses utilisateurs. Et là il y a encore des progrès à faire. 

A commencer par le plus simple et le plus évident : pourquoi n’est-il pas possible de coller un numéro d’assuré dans la case d’identification des patients ? Parce que cette fichue case n’accepte pas les espaces du numéro, qui figure avec dans tous nos dossiers. 
C’est là un point tout bête, purement technique, réclamé depuis le début, et toujours pas résolu. Mais absolument pas insoluble techniquement : dans l’onglet « ContactCOVID » ça fonctionne ! Donc c’est possible. 

L’autre manque flagrant, c’est la non intégration de la MGEN, de la CAMIEG, de la CNMSS, de la CRPCEN, de certains services pour certains assurés MSA

Quand un téléservice fonctionne bien il est massivement plébiscité par les médecins : le succès de la Déclaration Médecin Traitant l’atteste. Parce qu’on y trouve notre compte : c’est facile, c’est tracé, et les DMT ne se perdent plus (ou moins). 

Mais ce n’est pas le cas pour les deux derniers télésé(r)vices que la CNAM essaie d’imposer : le suivi des ALD et les prescriptions médicales de transport. Et pourtant nous avons eu droit ces dernières semaines à une nouvelle version pour chacun d’eux, toute nouvelle, toute belle … et non fonctionnelle !

Pour le suivi ALD c’est tellement fonctionnel que les deux versions coexistent sur AmeliPro !

Déjà c’est inutile pour les patients MGEN (cf les paragraphes précédents) 

la mention « contactez l’échelon médical du patient » est d’ailleurs savoureuse, puisque la MGEN n’en a PAS et délègue à la CPAM !

Mais même pour les affiliés normaux on obtient des messages surprenants : le patient existe, est dans la liste, a une ALD qui sera échue en août 2022, mais qui n’existe pas ! 

Mais le principal reproche qu’on peut faire aux deux versions du téléservice, c’est l’impossibilité de tout bêtement cliquer sur le nom d’un patient pour initier une prolongation d’ALD.

Non il faut retourner sur la page d’accueil, (se) retaper le numéro (sans les espaces !) et ensuite retourner dans l’espace de gestion des ALD et initier une nouvelle demande. Seule petite amélioration de la nouvelle version, le numéro étant indiqué (sans espaces) après le nom du patient, on peut quand même faire un copié-collé.

Et l’autre reproche c’est la gestion ubuesque du volet patient, qu’il faut imprimer (à l’ère du numérique) pour remettre au patient ensuite. Pourquoi ne pas le lui envoyer directement ? ou mieux le mettre à disposition dans SON espace personnel Ameli ou son tout nouveau « Mon Espace Santé » ? Il est forcément au courant de la demande et de la pathologie puisqu’il faut l’accord du patient pour demander une ALD. Je suis médecin, pas facteur. 

L’autre téléservice inutile qui en est à sa deuxième mouture c’est celui des prescriptions de transport. Pourtant l’idée est intelligente : pas de possibilité de fraude pour un secteur onéreux. 
Oui mais voilà il faut sélectionner la destination dans le module. Et les très intelligents commanditaires du bouzin n’ont rien trouvé de mieux de ne PAS permettre la saisie en texte libre. 
Il faut commencer par saisir la ville, mais là où n’importe qui se satisferait du code postal il faut préciser la ville. Et comme le machin n’a pas prévu les communes nouvelles, par exemple pour 50300 il n’y a pas moins de 4 lignes « AVRANCHES ». 
Puis l’établissement destinataire. Mais il faut l’intitulé exact. Il y a bien un outil censé aider avec seulement 3 lettres du nom, mais en pratique ça ne fonctionne pas. Par exemple pour l’hôpital d’Avranches aucun résultat avec Hôpital, ni avec Centre, il faut écrire CHAG (Centre Hospitalier Avranches-Granville).

C’était pourtant évident non ? Et l’hôpital de chez moi à St-Hilaire, soit il n’existe pas, soit son nom est tellement mystérieux que je n’ai pas réussi à le deviner. 

Bref au bout de quelques tentatives le médecin moyen, même motivé, abandonne purement et simplement.

Y a-t-il quelque part des gens qui interrogent les médecins et les autres professionnels de santé sur leurs besoins avant de concevoir ce genre de choses ? Des bêta-testeurs de terrain ?

Pour ma part je remonte très régulièrement ces « bugs » et « anomalies » à la CPAM50, je le signale aussi en CPL, mes collègues font de même, la CPAM remonte … mais rien de positif ne redescend jamais. 

Je le répète, les téléservices fonctionnels sont plébiscités sans qu’il soit besoin de les promouvoir. Les télésévices, non. 

J’ai donc très peur de la prochaine évolution qui résultera de la fusion des arrêts de travail et des accidents de travail en un service unique. Surtout qu’à chaque nouvelle « évolution » les éditeurs de logiciels médicaux doivent reprendre et réécrire les versions des téléservices intégrées aux logiciels.