Fusion des CERFA Accident de travail et Arrêt de travail : vers un futur fiasco ?

La CNAM a décidé, une fois de plus sans aucune concertation avec les syndicats de médecins libéraux, une fois de plus sans prendre en compte les impératifs des utilisateurs que sont les médecins, de modifier les dispositions des arrêts de travail maladie et Accidents de Travail (AT), et d’unifier leurs deux CERFA en un CERFA (et un téléservice) unique.

Ça pourrait sembler une bonne idée. Mais en fait il n’en est rien tant la réalisation laisse à désirer !

Heureusement cette unification ne prend effet qu’au 07/05/2022. Ce qui laissera la temps à la CNAM soit de corriger ses erreurs, soit de remettre à une date ultérieure cette fusion !

Que demandent les médecins libéraux ? Plus de simplicité et moins de charge administrative !

Que nous a inventé la CNAM ? une augmentation de la charge administrative et une complexification des choses !

A commencer par le tutoriel en ligne, qui ne comprend pas moins de 21 pages ! Ce qui démontre à l’évidence que ce n’est ni simple, ni intuitif. Les choses simples ne demandent pas 21 pages de mode d’emploi, surtout quand ce n’est (censément) qu’une évolution de ce qui existe déjà.

Détaillons un peu :

En cas d’accident de travail, le formulaire/téléservice ATMP perdure … mais seulement pour la déclaration initiale ou une nouvelle lésion :

Le Certificat médical AT/MP est dédié à la description des éléments médicaux en rapport avec l’accident du travail ou la maladie professionnelle(siège et nature des lésions…). Il est désormais réservé aux demandes d’imputabilité des lésions.

Corollaire : en cas d’AT/MP qui nécessite un arrêt de travail, il faudra faire une déclaration d’AT ET un arrêt de travail ! Mais dans sa grande magnanimité la CNAM nous laisse la possibilité de commencer par l’un ou l’autre, dans l’ordre qui nous convient, et nous assure que les informations seront conservées entre les deux formulaires. Mais évidemment uniquement en cas d’utilisation d’EspacePro, sinon il faudra tout resaisir !

En cas de prolongation d’un AT qui ne nécessite pas de prolongation de l’arrêt de travail, rien n’est prévu  ! Il n’est pourtant pas rare qu’un AT nécessite la poursuite des soins en permettant dans le même temps la reprise d’activité. Mais le service arrêt de travail ne permet que d’arrêter le patient (éventuellement en activité allégée ou en temps partiel thérapeutique) et le service AT nouvelle formule permet bien une prolongation, mais uniquement en cas de nouvelle lésion et forcément accompagnée d’un arrêt de travail (page 21 du mode d’emploi)

Il est indiqué sur la nouvelle page Ameli :

Il est inutile d’inclure dans la prescription les jours fériés et les jours de repos hebdomadaire (la plupart du temps, le week-end, mais votre patient peut, selon son emploi, bénéficier du repos hebdomadaire sur d’autres jours de la semaine) si le patient peut reprendre juste après ceux-ci.

et en cas de prolongation :

Toutefois, pour les jours de repos hebdomadaire et les jours fériés, une prolongation d’arrêt de travail peut être prescrite le lendemain du repos hebdomadaire ou d’un jour férié lorsque le dernier jour de l’arrêt initial prescrit est la veille du week-end ou du jour férié.

Ce qui est vrai pour le Régime Général (bien que ce soit une tolérance) mais faux pour les autres régimes et en tout cas totalement impossible en cas d’AT, où les prolongations doivent suivre l’arrêt initial sans aucune interruption.

Il y aura maintenant 7 (!!) cases pour les catégories socio-professionnelles au lieu de 4 jusqu’à présent. Peut-on au moins espérer que dans le cadre du téléservice elles se rempliront automatiquement ? et bien non, même pas !

Le téléservice permet toujours (sous la responsabilité du prescripteur évidemment) de faire commencer l’arrêt un ou deux jours avant la consultation, et même quatre jours avant en cas de COVID. Mais ce n’est pas prévu sur le CERFA.

Et il est maintenant possible d’autoriser certaines activités, en remplissant la case « informations » … mais toujours aussi sous la responsabilité du prescripteur.

Apparaît un nouveau cadre d’arrêt de travail, en plus de « en rapport avec ALD« , « en rapport avec une maternité », « en rapport avec un ATMP » :  » Décès d’un enfant ou d’une personne à charge« . C’est probablement une bonne idée. Ce qui l’est moins, c’est l’absence totale d’information sur cette nouveauté (qui était interdite jusqu’à présent) ou sur les durées d’arrêt qui seront considérées comme « acceptables » par les caisses dans ce cas.

Bref vous l’aurez compris, la simplification n’est là que pour la CNAM, qui espère transformer les médecins en agents de saisie, une fois de plus avec des services non aboutis. Heureusement cette fois-ci la CNAM a trois semaines pour corriger le tir. Ce qui, étant donné l’excellence de ses programmeurs et l’écoute qu’a la CNAM des médecins, ne devrait poser aucun problème !

A noter d’ailleurs que nous demandons depuis longtemps que soit réactivé le CTPPN (Comité Technique Paritaire Permanent National) conformément à la Convention médicale et à ses articles 65 et 82. Depuis la Convention 2016 et malgré nos demandes réitérées ce comité n’a jamais été activé ni même créé. Le CTPPN n’a en conséquence pas été réuni pour valider ces CERFA qui ne sont donc pas valides sur le plan réglementaire .

Bref Madame Lacaisse, la balle est dans votre camp.