Point-hebdo FMF du 09-01-2024

Chers amis,

Je vous ai laissés juste avant les fêtes de Noël, autrement nommée trêve des confiseurs. Mais de trêve, il n’y en eut pas, l’actualité fut riche durant ces 2 semaines, et pas forcément des plus réjouissantes. Mais comme nous commençons une nouvelle année, je vais rester résolument optimiste et voir le verre à moitié-plein.

Nous avons d’abord connu une séance de négociations le 21 décembre, synthèse des précédents groupes de travail. Côtés positifs :

  • l’Assurance-Maladie veut « mettre le paquet » sur le suivi des patients, surtout multi-pathologiques, âgés ou handicapés, c’est-à-dire ceux qui nécessitent disponibilité, réflexion complexe, consultations longues
  • elle entr’ouvre la porte au cumul de consultations + actes techniques
  • elle entérine la volonté de nous aider à l’embauche de personnel pour nous recentrer sur nos compétences médicales

Mais elle parle surtout de forfaits-médecin-traitant, veut limiter le cumul à quelques actes pour quelques spécialités, et continue de conditionner les aides à des objectifs d’accueil de toujours plus de patients ce qui devient ingérable voire dangereux. Et surtout aucun chiffre n’est lâché. Nous ne savons pas en quoi consiste « le paquet » : un petit sac de poudre de perlin-pimpin, ou le Directeur de la CNAM Thomas Fatôme a-t-il trouvé le trésor de Monte-Cristo ? Nous le saurons le 25 janvier.

Et pendant ce temps les médecins qui ont anticipé une inéluctable augmentation de tarif en appliquant des DE de façon large, ont commencé à recevoir des lettres dites « de rappel » de la part de leur CPAM, les menaçant de passage en Commission Paritaire Locale (CPL). La FMF vous rappelle que l’éventuelle sanction serait la non-participation de la Caisse aux cotisations sociales, c’est-à-dire se trouver en équivalent secteur 2 : tarifs supérieurs et cotisations payées en totalité par le médecin, ce qui représente en moyenne 3,50 euros/acte.

La traditionnelle Loi de Financement de la Sécurité Sociale (LFSS) est parue au Journal officiel le 30/12/2023. Sans surprise, elle entérine :

  • la mise en place des RDV de prévention (Art.41), mais c’est un arrêté qui précisera le montant des tarifs et les conditions de facturation. Sachant qu’en fait l’arrêté est paru avant l’adoption de la LFSS. Curieux pour une démocratie, mais bon …
  • surtout la possibilité pour le pharmacien de délivrer des antibiotiques en cas de cystite ou d’angine, sans avis médical (Art.52)
  • l‘interdiction de prescrire des arrêts de travail > 3 jours pour des actes de télémédecine (Art.65), sauf pour les médecins traitants et « en cas d’impossibilité de consulter un professionnel médical ». Ce qui ne va en rien gêner les sociétés commerciales de téléconsultations qui vivent de pathologies bénignes ne demandant que des arrêts de courte durée. Au contraire de certains spécialistes comme les psychiatres, qui peuvent suivre leurs patients en téléconsultation avec des arrêts au long cours.

Au total le budget dédié à la médecine de ville passe de 105 milliards d’euros en 2023 à 108,4 milliards, soit + 3,4 milliards, sur un budget global de 255 milliards. Alors que tout le monde s’accorde à dire qu’il faudrait débloquer le double pour rendre l’installation libérale réellement attractive et inverser la courbe de la démographie médicale. Pour ceux qui voudraient consulter les principaux articles sans avoir à tout lire, je vous ai fait un sommaire des articles nous concernant.

En ce même jour (30/12/2023) a également été publiée la funeste Loi dite Valletoux. Un peu vidée de sa substance tout-de-même puisque l’obligation pour les libéraux d’assurer des gardes à l’hôpital a été remplacée par l’obligation pour l’ARS de réunir les acteurs de la Permanence Des Soins en Établissements pour trouver des solutions en cas de carences dans les listes de gardes hospitalières (Art.17).

Il reste quand-même une sur-administration avec le renforcement des Conseils Territoriaux de Santé (CTS) qui auront la main-mise sur l’organisation des soins sur les territoires (Art.1). Je rappelle l’histoire : en 2015, les libéraux trouvent intelligent de se réunir entre eux (médecins, pharmaciens, infirmiers, …) sur leurs périmètres d’exercice pour innover des organisations de soins ; c‘était les CODTS. Super!, a dit le gouvernement, on va vous aider et vous subventionner : les CPTS étaient nées, avec leur cortège d’obligations, toutes uniformes, à Paris comme en Bretagne ou dans les Alpes. Mais certaines CPTS ont résisté, s’obstinant à rester à la main des libéraux pour des actions locales au plus près du terrain. Ce sont évidemment les plus efficaces, mais malheur à elles, elles ne cochent pas forcément toutes les cases. Nos chers élus y ont donc remédié en donnant tout pouvoir aux CTS, émanations des ARS, elles-mêmes nommées par le Ministère de la santé, avec une place infinitésimale laissée aux acteurs de terrain que sont les libéraux. Ou comment partir d’une bonne idée pour en faire un Machin …

A noter également l’obligation de déclarer au Conseil de l’Ordre et à son ARS, au moins 6 mois avant, son intention de cesser définitivement son activité dans le département (Art.7). Les exceptions seront listées dans un décret. Mais donc aujourd’hui il n’y a aucune exception, vous êtes censés savoir que dans 6 mois vous allez déclarer un cancer grave ou faire un AVC invalidant. On peut aussi prendre à la lettre en se disant que, selon les résultats de la Convention, on a tous plus ou moins l’intention de cesser son activité libérale dans 6 mois, et tous le déclarer officiellement …

Comme la LFSS, vous avez un sommaire des articles importants.

Tout cela sur un fond de tourmente ministérielle puisque notre Ministre Aurélien Rousseau a démissionné. Il est remplacé transitoirement par Madame Agnès Firmin-Le Bodo, pharmacienne de son état, qui vient d’être rattrapée par son récent passé marqué par des cadeaux conséquents de la part de l’industrie pharmaceutique, qui plus est, non déclarés. J’en profite pour vous rappeler que la FMF est un syndicat parfaitement indépendant de l’industrie pharmaceutique et de tout autre commerce d’ailleurs : pas d’assureurs, pas de plate-formes de RDV en ligne, … Nous ne vivons que de nos cotisations, aucun lien d’intérêt pour formater notre réflexion.

C’est d’ailleurs pour cela que certains d’entre vous, assurés à la Médicale de France ont reçu un courrier les informant d’une surtaxe pour 2024, sauf pour les adhérents à 1 syndicat : la CSMF. Information prise auprès de cet assureur, il s’agit d’une interprétation de l’URSSAF sur un texte très ancien. Ce texte dit que la Taxe Additionnelle de Solidarité est supprimée en cas de convention avec un syndicat professionnel représentatif. La CSMF ayant signé il y a longtemps cette convention, la Médicale (et les autres assureurs) appliquait cette ristourne à l’ensemble des médecins. Or l’URSSAF vient de décider qu’elle ne pouvait avoir lieu que pour les adhérents des syndicats signataires de cette convention. A ce jour, il semble que vous ne pouvez rien faire d’autre que payer, mais la FMF va voir quelle suite donner. Nous vous tiendrons au courant.

Pour finir avec 2 infos pratiques :

  • si vous recevez un patient de plus de 80 ans, dont vous n’êtes pas le médecin traitant, vous devez facturer 5 euros supplémentaires avec la majoration MOP. Cette majoration existait déjà, mais elle nous était payée chaque trimestre intégralement par la CPAM sous forme de forfait MPA. Maintenant c’est au patient de nous la payer directement, avec une prise en charge à 70% par la Caisse (ou 100% pour les ALD).
  • Notre ami Richard vous avait expliqué l’intérêt, purement alimentaire, d’envoyer les Volets de Synthèse Médicale (VSM) sur les Dossiers Médicaux Partagés (DMP) des patients en ALD avant le 31/12/2023. Eh bien, la Caisse repousse la date-limite au 30/06/2024, afin de tenir compte de nombreux logiciels dits « Ségur » tout juste opérationnels en décembre. On se demande comment elle peut prendre une telle décision puisque nous n’exerçons plus sous Convention mais sous Règlement Arbitral qui ne relève plus de l’Assurance-Maladie. Mais apparemment elle s’est arrogée ce droit.

Je vous souhaite une bonne semaine, et surtout une très belle année 2024 en espérant voir notre travail enfin reconnu. Car une Médecine Libérale qui se porte bien, c’est une population qui va mieux. Et sachez garder de bons moments pour vous, car nous ne sommes pas que des médecins.