La curieuse gestion des Télé-expertises …

Mise à jour du 16 août 2023 : 

La CNAM s’est finalement rendu compte que son attitude était contre-productive et a entendu nos arguments et ceux du SDV (Syndicat des Dermatologues-vénérologues).

La page Ameli relative aux téléexpertises affiche maintenant :

Quelles sont les règles de prise en charge applicables ?

La téléexpertise n’est pas cumulable avec d’autre acte ou majoration.

Elle ne peut donner lieu à aucun dépassement d’honoraire.

De manière dérogatoire, l’acte de téléexpertise est facturé en tiers payant ; il est pris en charge à 100 % par l’Assurance Maladie obligatoire.

Dans une logique de gradation de l’expertise et en cas de nécessité de poursuivre avec un examen clinique du patient après la réalisation d’une téléexpertise, un avis ponctuel de consultant peut être demandé au médecin requérant par le médecin traitant.

Cette nouvelle lecture de l’article 18 de la NGAP est logique. Ce qui n’est pas logique, c’est d’avoir dû batailler pour y arriver.


Décidément les jours se suivent et se ressemblent.

Après la curieuse gestion des SNP, nous avons droit à la curieuse gestion des APC à la suite d(une téléexeptise par la CNAM.

Voici en effet la réponse qu’a reçue le SDV (Syndicat des Dermatologues-vénérologues) après avoir posé la question de la succession à court terme des cotations TE2 puis APC pour un même patient :

Comme évoqué ensemble, il n’est pas possible de facturer une télé-expertise puis un APC. En effet, une TLE étant déjà un avis demandé à un spécialiste, il convient de facturer une consultation et non un avis ponctuel de consultant.
Nous avons transmis ces éléments au réseau de l’Assurance Maladie

Une fois de plus on peut se demander si la CNAM a appris à lire dans les mêmes livres que les médecins.

Parce que le texte de l’article 18 de la NGAP, précisé par la circulaire CIR 24-2017 de la CNAM, dit seulement :

Le médecin consultant ne doit pas avoir reçu le patient dans les 4 mois précédant l’avis ponctuel de consultant et ne doit pas le revoir dans les 4 mois suivants pour la même pathologie.

Le verbe « recevoir » a quand même une définition extrêmement précise qui n’est pas du tout celle de « donner un avis » :

Dans le Petit Larousse par exemple :

5. Accueillir quelqu’un chez soi, l’admettre auprès de soi à un titre ou à un autre : Commerçant qui reçoit ses fournisseurs le matin.

Cette lecture extrêmement restrictive que fait la CNAM est donc totalement hors sol.

Et on se demande à quel jeu elle joue !

Officiellement la CNAM veut développer la télémédecine, et plus particulièrement la téléexpertise.
Mais dans les faits cette attitude fait qu’un spécialiste qui donne un avis pour un patient, avis qui conduit à une consultation rapide, ne pourrait coter que TE2 puis CS+MPC+MCS au lieu de TE2 puis APC, soit 50 € au total au lieu de 75 €.

Il est évident alors que les spécialistes arrêteront de perdre du temps à faire des téléexpertises s’ils ne peuvent ensuite valoriser cette même expertise dans leurs cabinets en consultation.

La CNAM voudrait tuer les téléexpertises qu’elle ne s’y prendrait pas autrement !

Et ce ne serait même pas générateur d’économies ! Quel surcoût pour la société induit un retard de prise en charge de quelques mois d’un mélanome ? d’une SLA ? d’un angor vu au stade de l’infarctus constitué avec insuffisance cardiaque ?

Une telle attitude représente donc une perte de chance pour les patients, une non-reconnaissance de l’expertise des spécialistes de second recours, et une perte d’efficacité dans l’organisation du parcours de soins et de l’exercice coordonné efficace pour les généralistes. C’est un non-sens absolu.

 

Nous attendons de la CNAM qu’elle revoit sa lecture erronée de l’article 18 de la NGAP pour continuer à permettre ce qui est simplement du bon sens : facturer un APC quand la TE2 a conclu à la nécessité d’une consultation rapide.

Dr Nicole Cochelin, cofondatrice du réseau de téléexpertise Oncobreizh