17 février 2023 : 5ème bilatérale FMF-CNAM

Lien vers l’intégralité de la négociation

 

Cette fois-ci la réunion se déroule dans une ambiance nettement plus détendue. Même si nous n’avons toujours pas le support de présentation l’avance, la CNAM nous le promet très rapidement, après correction de quelques coquilles résiduelles.

Vous pouvez consulter le PPT intégral, dont j’ai tiré les images les plus significatives

Un premier point qui surprend un peu l’équipe des libéraux : la date ultime de signature d’une éventuelle convention est le 28 février, et non le 31 mars (6 mois après la dénonciation de la convention) comme nous le pensions tous, de façon à ce que l’arbitre puisse peaufiner son règlement arbitral avant la bascule dans ce mode de fonctionnement au 1er avril. Ce qui laisse extrêmement peu de temps à la CNAM pour présenter aux syndicats son projet de convention, encore moins à ceux-ci pour le lire, l’analyser, faire remonter leurs ultimes remarques, consulter leur base, et prendre leur décision. Je rappelle qu’à la FMF le ou la président•e ne peut pas signer seul•e sans l’aval du Conseil d’Administration, et que l’usage est de consulter TOUS les adhérents par un vote secret pour les textes aussi importants que la Convention (PS : pensez à adhérer si vous voulez peser sur le vote). Donc la signature, au moins de la FMF, est très  improbable dans le délai imparti.

Nous commençons par présenter à l’équipe de Thomas Fatôme les (nombreuses) questions et remarques que le Contrat d’Engagement Territorial (CET) et les modifications de la nomenclature nous ont inspirées.

Sans surprise la CNAM considère toujours que les revenus des médecins ont augmenté plus vite que l’inflation, même en tenant compte des charges qui grimpent aussi, et que l’augmentation de 1,50 € est un geste fort. Surtout qu’elle s’engage à ce que TOUTES les majorations et consultations complexes antérieures restent accessibles à tous, même non adhérents au CET. Alors que nous avions tous compris le contraire, c’est donc plutôt une bonne nouvelle ! Alors que c’est-il passé il y a deux semaines ? Au minima une incompréhension, nous dirons probablement une « pédagogie » inadaptée de la CNAM envers les libéraux, les esprits retors (dont je ne fais pas partie 😇) penseront que la CNAM a voulu tester la résignation des médecins.

Alors dans les points désagréables :

  • De toute façon l’augmentation de 1,50 € sur les actes de base n’entrera pas en vigueur avant 6 mois après sa publication au Journal Officiel, donc au mieux pas avant mi-août. Le législateur aurait eu la possibilité de réduire ou d’annuler ce délai, il ne l’a pas souhaité.
  • Ça ne concerne effectivement QUE les actes de base : C/CS, VG/VGS, COB, COD, CNPsy, CSC, APC … RIEN pour les consultations complexes ou les majorations de consultations complexes qui restent au même tarif.
  • La suppression des MIC, MSH, CSO est toujours en discussion. La CNAM s’étonne malicieusement qu’on réclame plus de simplification tout en désirant conserver des cotations certes utiles et utilisées, mais qui représentent moins de 1% de la masse des HSD (Honoraires Sans Dépassement).
  • Le CET n’entrera pas en vigueur avant 2024 … et donc les cotations de consultations majorées non plus.

Puis nous attaquons le vif du sujet. C’est très touffu parce qu’on revoit (rapidement) tous les points abordés lors des réunions précédentes, avec des points très techniques parfois.

  • Assistants : 4 nouveautés surtout
    • On comptabilise les enfants dans la patientèle ;
    • Si la patientèle ne baisse pas, mais que la file active atteint ses objectifs, ça valide l’ensemble des objectifs ;
    • Progression linéaire des objectifs sans effet de marche d’escalier ;
    • Ouvert à tous.
  • SNP-SAS :
    • Pour les spécialistes la cotation MCU (leur SNP à eux) reste possible jusqu’à 72 h ;
    • Les organisations territoriales (type CPTS) validées par l’ARS peuvent faire la régulation ;
    • En cas de visite effectuée dans les 8 heures une majoration de 10 € pourra être ajoutée.
  • On passe très vite sur les points techniques des instances conventionnelles, des procédures conventionnelles, des commissions de conciliation, c’est intéressant pour les syndicats, souvent moins pour les médecins de base.
  • La transition écologique : je préfère me taire, je ne comprends toujours pas ce que ça vient faire dans la convention.
  • La télémédecine :
    • Seuil de téléconsultations porté à 50 % ;
    • Téléexpertise non comptabilisée ;
    • De même que les téléconsultations entre le Médecin Traitant et ses patients ;
    • ou les téléconsultations après régulation du 15 ;
    • Les organisations territoriales (CDS, MSP, ESP, ESS, CPTS) peuvent être considérées comme des organismes d’offre de téléconsultation ;
    • Manque une cotation adaptée pour les téléconsultations « augmentées » avec un professionnel de santé aux côtés du patient et du matériel d’examen. La CNAM rechigne, parce que dans ce cas l’IDE peut aussi coter son acte.
  • Les équipes de soins spécialisées : c’est très très flou encore, ça se situe entre les DAC et les CPTS, personne n’a vraiment l’air de savoir ce qu’on va en faire. Mais ça brasse de l’argent : 80000 € pour la mise en place, 50000 € par an de subvention de fonctionnement.

Et maintenant le dur du dur de la négociation :

Le Forfait Médecin Traitant :

La grande nouveauté c’est qu’on parle d’augmentation pour tous les médecins. Ça avait un peu fuité sur les réseaux sociaux, Marguerite Cazeneuve l’avait mentionné, mais jusqu’à présent  rien d’officiel.
Alors ce n’est pas la révolution, mais les FMT pour les plus de 80 ans sans ALD passent à 50 €, de même que ceux pour les patients de moins de 80 ans en ALD. Les autres tarifs restent identiques, la CNAM chiffre le gain moyen à 1610 € par médecin traitant.

Et il y a toujours

  • la majoration de 30% pour les médecins exerçant en ZIP ;
  • la majoration de 30% pour les médecins s’installant moins de 3 ans après l’obtention de leur DES, cumulable avec la majoration de 30% ZIP le cas échéant ;
  • un doublement de la « prime C2S » pour les médecins traitants ayant plus de patients précaire que la moyenne nationale ;
  • et (c’est nouveau ça) une prime de 10000 € pour toutes les primo-installations en ZIP.

Avec la majoration de 7000 € par an en rapport avec l’augmentation de 1,50 € des actes de base, la CNAM estime que tous les médecins traitants gagnent 10000 € de plus par an, et 15000 € pour ceux qui exercent en zip (mais qui ne toucheront plus le COSCOM s’ils y étaient éligibles)

Évidemment, les praticiens faisant essentiellement des soins non programmés (et en particulier SOS Médecin ou les structures fixes dédiées) n’en profiteront pas.

OPTAM et OPTAM-CO.

L’OPTAM-CO devient … l’OPTAM-ACO par intégration des anesthésistes et de leurs actes techniques propres.

Sinon aucun changement, en particulier des bases de calcul initial qui restent à la situation de 2013-15-15 (!!) sauf que les anesthésistes auront une bonification de 8% sur leurs actes plutôt qu’un forfait payé l’année suivante, que les modificateurs K et T passent respectivement de 20 à 25% et de 11,5 à 16,5%, et que la règle de calcul du dépassement maximum pour les nouveaux installés devient tellement tordue que je n’ai pas encore réussi à la comprendre.

Nomenclature :

Rappelons ce que j’ai dit au début : sans le CET, la nomenclature reste ce qu’elle est actuellement, avec une majoration de 1,50 € sur les actes DE BASE.

Avec le CET, les consultations Niveau 1 sont à … on ne sait pas !! M. Fatôme réserve cette information pour les multilatérales des 22 et 23 février prochains.

Les consultations N2 (les consultations non obligatoires des enfants de moins de 2 ans et les consultations obligatoires des plus de 6 ans) passent à 40 € et les consultations N3 (suite d’hospitalisation, MPH, CCX, COE, CCP, les 10 consultations obligatoires des moins de 6 ans, la première consultation d’un patient en ALD, la consultation annuelle d’un patient en ALD de plus de 80 ans, l’APC, les consultations endocrinologues MCE, les dépistages de mélanome, les CCE pédiatriques) à 60 €.

Les cotations CCX pourraient être faites une fois par an.

En contrepartie la CNAM souhaite supprimer les consultation peu ou pas utilisées … dont MIC et MSH, mais la CNAM n’en fait pas une obligation.

Elle entrouvre (mais très très peu) aussi la porte à certaines associations NGAP – CCAM

  • Consultation + écho thyroïdienne ± biopsie … uniquement pour les endocrinologues (on a râlé ! et les MG alors ?)
  • Consultation + évacuation de collection articulaire pour les rhumatologues
  • Consultation + pose ou changement de DIU pour les MG et les gynécologues
  • Consultation + écho obstétricale pour les gynécologues

Et tout ça dépend de l’adhésion au fameux CET

Attention ! nouvelle règle !

3 cases seulement au lieu de 4, mais s’il faut cocher seulement une ligne dans les cases 1 et 2, il en faut 2 dans la case 3 !

La case 1 représente toujours l’obligation de voir plus de monde. Pour la CNAM ce n’est pas travailler plus. Mais différemment. Je reste assez … dubitatif.
Petite nouveauté : les enfants sont inclus dans la file active … mais toujours pas dans la patientèle.
Et l’item « 220 jours travaillés par an » est réservé … aux spécialistes. Pourquoi cette discrimination ? Tout bêtement parce que la moyenne des généralistes est  déjà à 225 jours travaillés par an !

Nous avons donc demandé que les généralistes AUSSI puissent bénéficier de cet item. Et évidemment essuyé un refus net.
Pour la petite histoire rappelons aussi que le code du travail limite le nombre de jours ouvrés à … 218 jours par an.

Et par ailleurs comment obtient-on le chiffre magique cible de 1200 patients adultes pour la patientèle P70 ? tout bêtement en divisant les 55 millions de français de plus de 16 ans par  les 47000 généralistes MT. Magique je vous dis. Mais qui ne tient absolument pas compte du fait que les patients ne sont pas tous interchangeables.

Raisonnons bêtement mathématiquement aussi : les enfants en bas âge sont vus environ 20 fois durant leurs 3 premières années. Alors que les jeunes actifs entre 20 et 50 ans ne consultent qu’une fois tous les 3 ans. Donc 1 nourrisson donne autant de travail que 20 jeunes actifs … mais pas du tout les mêmes avantages en terme de file active. Ni même en terme de patientèle puisqu’il compte pour du beurre.
Le même raisonnement s’applique aussi aux vieux polypathologiques.
La solution »bêtement » mathématique consiste donc à refuser les jeunes enfants et les patients compliqués pour ne garder que les « simples ».

Et on peut dire aussi qu’évidemment les femmes, surtout les jeunes, qui ont des contraintes horaires pour s’occuper de leurs enfants, et font souvent par goût plus de pédiatrie, vont se trouver défavorisées et discriminées par ce mécanisme.

Par contre la CNAM nous a assuré

  • que les objectifs cibles ne bougeraient pas durant toute la durée de la convention ;
  • qu’il y aura des aménagements pour les temps partiels du moment que le temps non libéral est consacré à la médecine non libérale ;
  • qu’il n’y aura pas d’indus si à les fin de l’année on ne rentre plus dans les cases, on rétrograde juste à la situation « inférieure » pour l’année suivante ;
  • et des adaptations concernant le cumul emploi-retraite pour éviter de les pousser vers une retraite complète.

Pour les cases 2 et 3 je vous laisse lire par vous-même. À noter qu’il manque PSLA dans la case 3 (au même tire que MSP) mais c’est un oubli nous a-t-on assuré.

Alors qu’en penser au final ?

Il y a évidemment des avancées, mais qui restent très en deçà des attentes. Les mouvements de l’hiver ont probablement fait bouger les lignes, mais l’acte de base à 26,50 € reste évidemment très insuffisant, que ce soit dans ou en dehors du CET.

Faut-il s’en contenter ?

J’ai évidemment MON opinion, mais ce sera aux adhérents de la FMF de voter (un adhérent = une voix) pour déterminer l’attitude de la FMF.

Le calendrier est contraint. Et même très contraint. Mais nous lançons dès à présent le débat en interne pour donner – ou non – le mandat à Corinne Le Sauder de signer cette Convention avant le 28 février.

Et nous invitons les autres syndicats représentatifs à en faire autant.

La démocratie doit rester à la fin la grande gagnante.