Système de Retraite Universel contre Régime CARMF actuel : le match !

La réforme du Système de Retraite Universelle (SRU) est lancée. Lancée sans aucune concertation ou négociation, les administrations de tutelle n’ayant eu que la politesse minimale de nous tenir informés de leurs décisions, et encore de façon incomplète, ce qui laisse encore bien des zones d’ombre.

Voilà comment on peut résumer de façon synthétique la situation, telle que nous la connaissons, et les avantages ou inconvénients du SRU par rapport au système actuel de la CARMF que nous connaissons :

Avantages

Inconvénients

Incertitudes
Moindre pression sur les petits revenusCotisation de « solidarité » de 2,81 % dès le premier euro cotisé sans création de droitPas de visibilité sur la cotisation « Invalidité » ni le rôle de la CARMF dans l’indemnisation des congés maladie
Moindres cotisations nominalesMoindres pensionsPas de visibilité sur les avantages conventionnels
Simplification (théoriquement) et plus de justiceLa justice sociale n’en est pas vraiment une puisque les salariés ne paient que 40% de leurs cotisationsFaisabilité à long terme : les projections chiffrées n’ont pas été communiquées
Transfert du recouvrement à l’URSSAF via l’ACOSSInquiétudes sur les réserves du régime complémentaire
Perte du rôle de gestion de la CARMFPas de visibilité sur la gouvernance

On peut en rester là ou approfondir 

En particulier en ce qui concerne les incertitudes. Nous n’avons que les grandes lignes du projet, et les taux de cotisation envisagés. Les projections actuarielles (dont on espère qu’elles ont été effectuées !) n’ayant pas été communiquées, les analystes de la CARMF ne peuvent pas se prononcer sur la faisabilité de la réforme et son équilibre à long terme. Mais ils sont pessimistes du fait :

  • de la garantie des droits acquis jusqu’à 5 PASS (Plafond Annuel de la Sécurité Sociale) alors que les cotisations (hors solidarité) seront plafonnés à une base de 3 PASS ;
  • de la majoration des pension de 5% par enfant dès le premier enfant ;
  • de la distribution de nouveaux droits (jeunes travailleurs sous payés, aidants) ;
  • du cumul emploi-retraite qui ouvrira des droits supplémentaires. 

L’annonce en plein été, avant même la mise en place du nouveau régime, du transfert du recouvrement à l’URSSAF via l’ACOSS est un mauvais signal, surtout pour les médecins qui ont eu maintes fois la preuve que la CARMF était un interlocuteur plus fiable que l’URSSAF. La CARMF est gouvernée par des administrateurs élus par les médecins, même si elle doit se plier aux règles de la tutelle de l’État ; l’URSSAF est une administration sur laquelle nous n’avons pas la moindre emprise ou influence. 

Concernant les pensions, elle devraient baisser mécaniquement d’environ 30%, du fait :

  • de la baisse des cotisations ;
  • d’un moindre rendement de ces cotisations (d’ailleurs non garanti) par rapport au rendement actuel du Régime Complémentaire, garanti par des réserves patiemment engrangées au prix de cotisations majorées et de la minoration de la valeur du point ;
  • de la redistribution au nom de la solidarité nationale.

Malheureusement le transfert prématuré de la gestion de la CARMF vers l’ACOSS laisse craindre des envies de captation des réserves du régime complémentaire, spoliant ainsi les médecins du fruit de leurs efforts.

Pour ce qui est des cotisations et des « avantages » conventionnels, qu’il conviendrait plutôt d’appeler « compensations conventionnelles », rien ne vaut un tableur pour essayer d’y voir plus clair.

Il convient évidemment de se référer aux colonnes du secteur II pour vraiment évaluer l’impact de la réforme, celle du secteur I CARMF étant « artificiellement » modifiée par l’application des compensations conventionnelles.

Il saute aux yeux que le SRU est nettement plus avantageux pour les petites activités (BNC < 1 PASS), malgré la majoration du taux de cotisation dans cette tranche, du fait de la disparition de la part forfaitaire de l’ASV, qui pèse très lourd sur les petits revenus. Curieusement, entre 1 et 2 PASS, cet avantage disparaît, pour se majorer ensuite avec l’augmentation du BNC.

Pour les secteurs I, sans application des compensations conventionnelles, ça n’est vrai que pour les très petits BNC (moins de 20000 € par an). Ce qui démontre bien que cet aspect des compensations conventionnelles est absolument fondamental. Mais il n’est garanti que pour la durée de la convention actuelle, et devra donc être renégocié pour la prochaine convention.

3 étages aux compensations conventionnelles :

  1. Au niveau de l’URSSAF : prise en charge par la CNAM de la partie de la cotisation Assurance Maladie excédant 0,1 % ; par un tour de passe-passe la CNAM a d’ailleurs empoché à son seul profit la baisse de 9,7 à 6,5% de ce taux en 2016, sans aucune compensation pour les médecins. Elle réalise ainsi 300 millions d’euros d’économie par an, ce qui correspond à 6000 € par médecin secteur I libéral, soit quasiment le montant de la majoration MMG ! Et prise en charge d’une part variable de la cotisation CAF en fonction du BNC
  2. Compensation de la hausse de la CSG : l’avenant 5, durement négocié, a entériné la prise en charge d’une partie de la cotisation du Régime de Base CARMF pour compenser la hausse de la CSG, la baisse de la cotisation CAF ne suffisant pas à atteindre l’équilibre
  3. Prise en charge des 2/3 de la cotisation ASV (soit 3382 € + 2,4 % du BNC) ; cette compensation a été maintenue de haute lutte lors de la négociation de la dernière convention.

Il semble évident de ne pas revenir sur l’avenant 5 ou du moins sur le principe de la compensation de la hausse de la CSG. C’est un simple principe d’équité par rapport aux autres Français. On touche ici du doigt l’erreur de compenser au niveau de la retraite une cotisation prélevée par l’URSSAF. Mais il reste tout-à-fait possible d’appliquer au SUR la baisse de cotisation prévue pour le Régime de Base. 

Quant à l’ASV qui disparaîtrait aussi, la compensation est applicable aussi au SRU. Avec pour les très bas revenus inférieurs à 10000 € par an une cotisation qui deviendrait négative !

On se retrouverait alors avec des cotisations pour les Secteur I en baisse modérée par rapport aux prélèvements actuels (mais en adéquation toutefois avec la baisse prévisible des pensions servies). 

Il conviendra donc de rester extrêmement fermes lors des prochaines négociations conventionnelles pour ne pas diminuer le niveau de ces compensations, et d’obtenir une unité et une unanimité syndicales sur ce point. 

Pour l’instant l’urgence est à la sauvegarde de la gestion de la retraite des médecins par la CARMF et des réserves du Régime Complémentaire. L’action commence le 16/09 et nous comptons sur la présence des médecins nombreux aux côtés des autres professions libérales.