Fauteuils roulants : le grand foutoir !

Le président Macron l’avait promis : « Prise en charge à 100% des fauteuils roulants pour tous avant 2026 ».

Le président l’a promis, le ministère de la Santé l’a mis en place.

Les nouvelles modalités de prescription et de prise en charge seront donc effectives le lundi 1er décembre 2025, et sont détaillées au journal officiel du 10 octobre 2025 mettant en place l’arrêté du 6 février 2025.

La CNAM l’a relayé en envoyant un mailing à tous les médecins de France.

Vous serez ravis d’apprendre que « La réforme vise à améliorer l’accès aux fauteuils roulants pour toutes les personnes en situation de handicap, en garantissant une prise en charge intégrale et en simplifiant les démarches administratives. »

Mais quand je vois le mot « simplification » dans un texte ministériel, un red flag s’agite immédiatement dans ma tête. Et c’est encore justifié.

Ça commence déjà très mal : le terme « fauteuil roulant » est visiblement dépassé, maintenant, il faut parler de « VPH » (véhicule pour handicapé), et ça se décline en  16 versions, chacune avec son joli acronyme : FMP, FMPR, BASE, POU_S, FRM, FRMC, FRMA, FRMS, FRMP, FRMV, FRE, FREP, FREV, POU_MRE, CYC et SCO … qu’il faut obligatoirement utiliser. Heureusement, un glossaire est fourni… au début de l’arrêté du 6 février.

Il faudra aussi préciser si la prescription concerne une location de courte durée, une location de longue durée, ou un achat.

Et à part les 4 premiers (Fauteuil Manuel à Pousser, Fauteuil Manuel à Pousser Rigide, Base modulaire roulante, Poussette Standard), la prescription se fera au moyen de deux formulaires, la Fiche d’évaluation des besoins (9 pages !!) et la Fiche de préconisation (8 pages !!). À remplir bien évidemment complètement… sans que le Ministère ou l’NCAM ait évidemment pensé à valoriser la consultation comme une consultation complexe, voire très complexe.

Et là ne s’arrête pas la complexité.

Les médecins, les ergothérapeutes et les masseurs kinésithérapeutes (uniquement pour la location) sont autorisés à prescrire un fauteuil roulant, mais le cadre de prescription est adapté en fonction de la complexité du produit et des besoins de l’usager.

Pour les fauteuils simples, un médecin ou un ergothérapeute peut prescrire seul, tandis que pour les fauteuils complexes, une équipe pluridisciplinaire est nécessaire pour une approche globale, associant par exemple un médecin spécialiste, un ergothérapeute ou un masseur-kinésithérapeute.

Il est prévu de former davantage les prescripteurs via le développement professionnel continu (DPC), avec des formations reconnues comme celles prévues dans les formations initiales ou le DPC en compensation du handicap.

On se demande juste comment ces formations DPC pourront être mise en place, alors que le démantèlement de l’ANDPC est acté pour le mois de janvier 2026 !

Et bien sûr, le fournisseur devra quand même faire une demande d’entente préalable (sauf pour les modèles les plus simples hors achat). Là ne s’arrête d’ailleurs pas ses obligations : il devra aussi pouvoir faire choisir au moins 4 modèles sur catalogue, en faire essayer physiquement au moins 2, et assurer une réparation en cas de panne en moins de 3 jours.
Autant dire que la très grande majorité de nos amis pharmaciens va se désengager de ce service, et qu’il ne restera plus que les grands groupes de prestataires.

Par ailleurs, en parcourant les textes, on découvre d’autres perles, comme la limitation de la location de courte durée à 6 mois, au bout desquels on doit acquérir le fauteuil loué. Et si finalement ce dernier ne convient pas et que le patient refuse l’achat… il ne peut plus bénéficier d’une autre VPH avant un délai de carence d’un an.

Au total, la promesse du président sera tenue, mais à quel prix ? désengagement des médecins traitants, des pharmacies de proximité, allongement des délais de traitement des demandes, complexité de la procédure « de simplification ». Une procédure hors sol, le fruit d’une administration hypertrophiée qui se nourrit de normes et de tableaux Excel, mais bien loin des patients, de leurs besoins réels et du soin.