Des déboires à prévoir pour la ROSP 2020 ?

La ROSP est censée promouvoir la qualité des soins et valoriser cette qualité.

Encore faudrait-il que la CNAM suive les évolutions de la médecine pour que ça reste pertinent.

Un exemple emblématique : le dépistage du cancer du col utérin.

La HAS a fait évoluer (depuis 2018 déjà !) les modalités de dépistage qui varient désormais selon l’âge des femmes

  • Pour les femmes entre 25 et 29 ans, les modalités de dépistage antérieures sont maintenues : le test de dépistage est réalisé par examen cytologique tous les 3 ans, après deux premiers tests réalisés à 1 an d’intervalle et dont les résultats sont normaux.
  • Pour les femmes de 30 ans à 65 ans, la HAS a fait évoluer les modalités de dépistage (en actualisant ses recommandations de 2010). Elle recommande que le test HPV-HR, plus efficace pour ces femmes, remplace l’examen cytologique. Le test HPV-HR est réalisé 3 ans après le dernier examen cytologique dont le résultat est normal. Un nouveau test est refait tous les 5 ans, jusqu’à l’âge de 65 ans, dès lors que le résultat du test est négatif.

La recommandation datant de 2018, les médecins et les laboratoires se sont mis à l’appliquer.

La CNAM elle reste imperturbablement sur le texte de la convention de juillet 2016 :

 Part des patientes MT de 25 à 65 ans ayant bénéficié d’un frottis au cours des 3 dernières années

Or cette part va forcément baisser puisque si on suit la recommandation on fait un frottis à 25, 26 et 29 ans, puis une détection HPV tous les 5 ans à partir de 32 ans.

D’autant plus que la CNAM recense les frottis sur les codes CCAM JKQX001, JKQX347, JKQX261, JKQX027, JKQX008, JKQX147, JKQX426, JKQX015, qui sont exclusivement des codes d’examen cytologiques. La détection HPV a le code ZZQP173. Qui n’est pas inclus dans la recherche de la CNAM pour la ROSP.

Donc pratiquement toutes les femmes de plus de 30 ans ne seront plus comptabilisées comme ayant participé au dépistage ! Il est donc plus qu’urgent que la CNAM mette ses méthodes de calcul à jour.

Pour la vaccination anti-grippale, la CNAM ne nous donne tout bêtement pas les moyens de remplir notre mission : elle a émis 13 millions de « bons de vaccinations », auxquels manquent d’ailleurs un certain nombre de personnes fragiles : femmes enceintes (il ne devrait pourtant pas être difficile de leur envoyer, il n’y a pas beaucoup de grossesses non déclarées), patients en surpoids, entourage de patients vulnérables, etc …
Mais à côté de ça, elle n’a provisionné que 11 millions de doses de vaccins d’après l’USPO qui répresente les pharmaciens d’officine !

Et un autre souci qui va se poser, c’est le retentissement de la crise COVID sur la ROSP et le Forfait Structure.

Pour le Forfait Structure, la CNAM a anticipé : l’indicateur Pourcentage de Feuilles de Soins Électroniques (FSE) sera neutralisé, pour tenir compte du grand nombre de Feuilles de Soins Dégradées qui ne sont pas comptabilisées comme des FSE, et Apicrypt V1 aura une dérogation prolongée d’une année pour compenser les difficultés de déploiement de la V2.

Mais, pour la ROSP, la CNAM a organisé en septembre une réunion avec les représentants syndicaux, dont le résultat a été : « Circulez, il n’y a rien à voir, la crise COVID n’a aucune incidence notable sur les indicateurs de la ROSP ».

Et pourtant, il y a de quoi en douter. Même sans tenir compte du deuxième confinement, le rapport Epi-Phare met en évidence :

  • une forte augmentation des prescriptions d’anxiolytiques
  • une forte augmentation des prescriptions d’hypnotiques
  • un fort déficit de la vaccination, en particulier infantile

La réduction de l’activité médicale aura forcément aussi des conséquences sur 

  • les bilans de surveillance des diabétiques
    • nombre d’HbA1c
    • surveillance de la fonction rénale
    • surveillance du fond d’œil
  • la surveillance rénale des hypertendus

  • la surveillance des traitements anticoagulants

  • les EFR des asthmatiques
  • les bilans bucco-dentaires
  • et les dépistages du cancer colorectal dont les envois ont été gelés pendant plusieurs semaines.

Enfin une particularité du calcul de l’item des vaccinations infantiles impacte ses résultats :

L’item ROR est libellé : Part des patients MT de moins de 2 ans ayant reçu deux doses de vaccin ROR.

Pourtant le calcul est effectué sur les patients MT de 19-30 mois (au 31/12 de l’année N). Si un enfant de moins de 24 mois n’a eu qu’un seul ROR au 31/12, mais qu’il reçoit la deuxième dose ensuite avant son deuxième anniversaire, il n’est pas compté dans les statistiques de la CNAM comme correctement vacciné !

Même chose pour la vaccination antiménigococcique, qui porte normalement sur les enfants MT de moins de 18 mois ayant reçu une dose de vaccin anti méningocoque C, mais est calculée sur les enfants MT de 15-26 mois.

Quelle justification la CNAM a-t-elle pour cette manière si particulière de compter ?

Alors que penser à ce jour, fin 2020, de la ROSP 2020 qui sera payée en avril 2021 ?

L’année si particulière que nous avons connue aura indubitablement des répercussions sur la ROSP, qui ne pourront pas être compensées par la clause de sauvegarde, qui n’existe plus.

Mais ça laisse 5 mois à la CNAM pour étudier tous les points que nous soulevons, et imaginer des mécanismes pour en tenir compte. Et aussi pour mettre l’item « dépistage du cancer du col » en adéquation avec les pratiques médicales validées, et corriger les curiosités du calcul des items des vaccinations infantiles.

Nous attendons donc avec confiance ses propositions, qui seront, nous n’en doutons pas, forcément pertinentes.