Sonorisation de la salle d’attente et redevance

Une décision de la CJUE sème le trouble

L’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne en date du 15 mars 2012 (affaire C‐135/10) concernant la sonorisation d’un cabinet dentaire en Italie, est venu jeter le trouble en laissant entendre aux professionnels de santé en France qu’ils pouvaient arrêter de payer une redevance à la SACEM (Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique). C’est bien ce que l’on pouvait lire sur le site Droit-médical.com.

Cet arrêt de la CJUE a reconnu que « la notion de “communication au public”, au sens de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 92/100, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne couvre pas la diffusion gratuite de phonogrammes dans un cabinet dentaire, […] dans le cadre de l’exercice d’une profession libérale, au bénéfice de la clientèle qui en jouit indépendamment de sa volonté. Partant, une telle diffusion ne donne pas droit à la perception d’une rémunération en faveur des producteurs de phonogrammes. » Il est interprété par la SACEM dans le sens d’une exonération partielle ne concernant que la redevance due à la SPRE (Société pour la Perception de la Rémunération Equitable) chargée de collecter les droits des artistes interprètes et producteurs de disques, mais n’exonére pas de la redevance due à la SACEM qui elle collecte et répartit les droits des auteurs, compositeurs et éditeurs !

Il est important de savoir que la SACEM (Société des Auteurs Compositeurs et Editeurs de Musique) et la SPRE (Société pour la perception de la Rémunération Equitable) sont indépendantes :
• La SACEM collecte et répartit les droits des auteurs, compositeurs et éditeurs,
• La SPRE est chargée de collecter les droits des artistes interprètes et producteurs de disques.

La SPRE a signé un contrat de prestations avec la SACEM qu’elle a chargé de collecter cette rémunération dans les lieux sonorisés (café, restaurant, commerce, parking…). Les utilisateurs de musique ont ainsi un interlocuteur unique même s’ils reçoivent deux factures, l’une à en-tête de la SACEM et l’autre à en-tête de la SPRE. Dans un souci d’économie et de souplesse, la SPRE a mandaté la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM), pour percevoir la Rémunération Equitable en son nom, auprès des 250.000 lieux sonorisés (hôtels, restaurants, cafés, salons de coiffure, magasins, cinémas, parcs de stationnement…), et autres 150.000 manifestations occasionnelles (bals, kermesses, banquets…)

La SPRE collecte dans le cadre d’un mandat légal la Rémunération Equitable, qui est ensuite répartie par ses sociétés membres. Elle est cogérée par quatre sociétés (SCPP, SPPF, ADAMI, SPEDIDAM) qui répartissent ces droits directement aux artistes-interprètes et aux producteurs sur la base des relevés de diffusion fournis par les chaînes de télévision et les radios ou par sondage pour les autres diffuseurs de musique.

Selon la lecture de la SACEM, la décision de la CJUE ne concernerait que la rémunération équitable (droits des artistes interprètes et producteurs de disques) mais pas celle de la SACEM (droits des auteurs, compositeurs et éditeurs) et en effet la décision de la CJUE précise bien « … rémunération en faveur des producteurs de phonogrammes. »

A titre indicatif, la redevance annuelle TTC réclamée par la SACEM est liée au nombre de praticiens exerçant dans le cabinet médical (comptez environ 97€ pour 1 à 2 praticiens, 185 € pour 3 à 5 praticiens et 277 € au delà de 5).


Dr Marcel GARRIGOU-GRANDCHAMP, CELLULE JURIDIQUE FMF
56 rue Jeanne d’Arc 69003 LYON
Tél : 04 72 33 52 94 Fax : 09 56 76 12 53
mel : mgarrigougran001@cegetel.rss.fr

PS 1  : Suite au point hebdo 78 du 02/02/2014 se référant à cet article les responsables de la SACEM n’ont pas vu apparemment le lien qui pointait sur l’article et ont adressé un courrier au Président de la FMF que je reproduis ci-dessous ainsi que la réponse apportée. MGG

PS 2 : Le ministère de la Culture et de la Communication Français interrogé à ce sujet a indiqué qu’à la suite de la décision de la CJUE, la commission qui fixe en France les barèmes de la rémunération équitable n’a pas pris de nouvelle décision et qu’il appartient aux redevables « de s’acquitter du paiement des sommes dues sauf à s’exposer à ce que la SACEM et la SPRE fassent usage des voies de droit qui leur sont ouvertes ou a ce que les redevables contestent en justice les factures qui leur sont adressées » MGG (source CNOM Médecins n°55 mai-juin 2018)