Pourquoi nous avons fait le choix d’être président.e de CPTS

Lettre ouverte à nos amis de Médecins pour Demain

Pourquoi nous avons fait le choix d’être président.e de CPTS.

La vie de médecin libéral n’est pas un long fleuve tranquille et le combat pour nos conditions de travail est permanent, que ce soit dans le cadre conventionnel (la « négociation » en cours nous le rappelle douloureusement), dans le cadre de la représentation régionale vis à vis des instances (mandats URPS ML) ou dans le cadre réglementaire (la loi RIST en est une preuve évidente).

C’est dans ce climat systématiquement hostile, qu’est apparue la nouvelle « coqueluche » des autorités de santé, la CPTS, avec une réelle nouveauté : une préoccupation territoriale. Une bonne volonté au départ : donner aux professionnels de santé de ville les moyens de s’organiser, suivie immédiatement après de tentatives de contrôle et de contraintes. Ce fonctionnement est atavique en France, en attendant qu’il change, il faut faire avec.

Le contexte local est fondamental : une CPAM et une ARS plus ou moins souples, certains représentants d’autres professions en embuscade, des établissements de santé voulant être tentaculaires.

Malgré ce contexte, nous avons considéré qu’il y avait une opportunité à saisir :

  • Un contrat de cinq ans, qui fixe des missions

  • Des actions et des indicateurs proposés par la Ville, pour réaliser ces missions

  • Des moyens humains et matériels pour mettre en œuvre ces actions

  • Une faible part du financement indexée sur les indicateurs

  • Un travail de terrain avec les autres professions de santé.

Après quelques mois d’exercice, nous pouvons tirer un premier bilan : il y a deux types de CPTS, celles qui fonctionnent et celles qui ne fonctionnent pas mais il n’y a pas de CPTS qui agisse contre les médecins libéraux.

Les principales missions concernent essentiellement les médecins (accès au MT, accès aux SNP, parcours de patients) : il est évident qu’une CPTS ne peut pas fonctionner et proposer des solutions adaptées, concrètes et acceptables pour réaliser ces missions sans médecin dans sa gouvernance.

Notre constat : quand les PS sont organisés sur le terrain, ils peuvent s’imposer dans des dispositifs innovants  et se défendre collectivement. Il  y a une CPTS par territoire :  tous les PS peuvent y participer, pour proposer et innover, utiliser ces outils pour améliorer leurs conditions de travail, et participer à l’organisation de l’offre de soins globale d’un territoire.

A titre d’exemple :

  • lorsqu’une organisation de mutualisation des SNP fonctionne sur un territoire, la mise en œuvre de protocoles de coopération devient caduque car inutile.

  • une organisation de SNP qui fonctionne c’est par exemple une régulation des SNP de premier recours par les paramédicaux, et une régulation des SNP de 2e recours par les MG, ainsi tout le monde y trouve un intérêt, y compris les médecins qui donnent de la disponibilité à la CPTS.

Quelques éléments factuels :

  • C’est une association 1901, avec une gouvernance indépendante (ni l’ARS ni la CPAM n’y siègent) qui ne peut rien imposer aux professionnels de santé. Si vous ne voulez plus en être, il suffit de ne pas cotiser.

  • L’ACI fixe le cadre mais rien ne concerne individuellement les participants.

  • La part variable n’est qu’une petite part de l’ACI qui ne met pas en cause le fonctionnement :  on peut encore la réduire en trouvant d’autres financements. Autrement dit l’atteinte des indicateurs de résultats impacte peu le budget de la CPTS.

  • L’adhésion à une association 1901 ne donne aucune obligation à ses membres  : elle permet en revanche de participer aux prises de décision en AG, ou encore de se présenter pour participer à sa gouvernance.

  • L’implication est variable suivant ce que souhaite le médecin, du leader responsable à l’adhérent, en passant par les participations aux différents projets (utilisation d’outils de la CPTS sans contrepartie, proposition de projet répondant à un besoin identifié, participation à l’écriture, participation aux actions)

  • Le financement de la coordination n’est pas du financement du soin, mais est de l’argent donné aux professionnels pour s’organiser. Avoir un, deux ou trois salariés qui mettent en place nos actions nous change des bénévolats usants de ces dernières années. Contrairement au modèle hospitalier, il s’agit bien de budgets dont l’utilisation est décidée et mise en œuvre par des professionnels de santé, et non pas par des administratifs.

  • La négociation avec l’ARS et la CPAM sont comme toutes les négociations avec les autorités de santé : musclées et parfois déprimantes.

  • Les obligations seront dans la convention, pas dans les CPTS.

 

La CPTS est également reconnue sur un territoire comme l’interlocuteur identifié en matière de santé, utile pour aller discuter avec les collectivités de démographie médicale, d’attractivité territoriale, ou encore de réglementation locale (certificats de cantine, crèche, centre aérés etc).

Les médecins qui ont fait le choix d’être à  la tête d’une CPTS, parce qu’ils ont analysé les conditions locales, ne sont ni naïfs ni collabo ; ils ont essayé parce que les espaces d’innovation et de pouvoir sont rares et que la profession est réellement en danger. A la fin des cinq ans, ils feront peut-être le constat de leur échec, en attendant, ils labourent et occupent le terrain.

Pour conclure, paraphrasant Esope, « les CPTS sont la pire et la meilleure des choses », la pire si l’Etat arrive à en faire un outil de contrôle des professionnels de santé de ville, la meilleure si les professionnels de santé s’en emparent pour dynamiser leur cadre de travail 

A votre disposition pour en parler sereinement et factuellement, car de notre point de vue, la défense de notre profession et de son attractivité passeront aussi par les CPTS. 

Amitiés syndicales

Dr Pascal Charbonnel, Dr Florence Zemour

Dr Bernard Elghozi, Dr Bruno Gay, Dr Renaud Ferrier, Dr Olivier Guercia, Dr Dominique Dreux, Dr Philippe Cholet, Dr Genevieve Richard, Dr Fabien Besancon, Dr Jean-Marc Laruelle, Dr Anne Criquet-Hayot.

 


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