Point-hebdo FMF du 28-01-2024

Chers amis,

J’aurais aimé vous annoncer enfin les intentions de l’Assurance-Maladie quant à notre possible future Convention, puisque notre séance cruciale de négociations devait se tenir jeudi dernier 25 janvier. Mais remaniement ministériel oblige, cette réunion a été reportée au 8 février, le temps que le Directeur Thomas Fatôme prenne ses ordres auprès du nouveau gouvernement. A noter au passage que ce dernier n’a toujours pas désigné de Ministre dédié.e à la santé.

C’est d’autant plus dommageable que nous sommes restés sur une grande inquiétude après la deuxième vague de groupes de travail, appelés « Focus » (ne pas oublier de prononcer le s à la fin). Synthétisés dans le Feuilleton des Négos de notre ami Richard Talbot.

Pour être honnête, les groupes dédiés aux spécialités médico-techniques et aux spécialités chirurgicales se sont bien déroulés. Les syndicats ont exigé unanimement de réévaluer l’ensemble de la CCAM dont les tarifs, bloqués depuis plus de 20 ans pour la plupart des actes, ne correspondent absolument plus aux coûts réels. Ce n’est pas un hasard si 90% des chirurgiens ont choisi le secteur 2. La FMF a soulevé en plus l’indignité des fonctions transversales (Réunions de Concertation Pluridisciplinaires, prévention des risques nosocomiaux, …) qui ne sont pas rémunérées. De même, nous ne voulons plus d’actes inscrits dans la Nomenclature mais tarifés 0 euro, ce qui interdit toute forme de rémunération puisque nous ne pouvons pas coter HN. Comment peut-on admettre qu’un acte soit reconnu utile puisque figurant dans la Nomenclature, mais dire qu’il vaudra 0 euro ?

La discussion sur les Equipes de Soins Spécialisés (ESS) s’est aussi révélée positive, la Caisse acceptant de diminuer ses exigences en termes de nombre minimal de médecins participant (elle demandait 50%, elle accepte 20%) et de limitation de pathologies à l’intérieur d’une spécialité (par exemple une ESS dermato peut ne pas traiter toute la dermatologie mais seulement les tumeurs cutanées).

Allez, on passe maintenant au Focus « Prévention ». De quoi allions-nous parler, sachant que la Consultation de Prévention est déterminée par décret et ne passe pas par la Convention ? Je vous le donne en mille : de la ROSP uniquement. Pourtant les syndicats avaient clairement affiché leur hostilité à ce forfait, sur lequel nous n’avons aucune visibilité : calculs opaques, prise en compte des prescriptions d’autres confrères, exclusion de nombreux patients, … « Pas grave, vous n’en voulez pas ? Eh bien comment voulez-vous la dénommer maintenant ? Et quels indicateurs choisir ? ». Monsieur Fatôme, comment vous le dire : on ne VEUT PAS de la ROSP ! Alors si vous souhaitez le lui dire également, remplissez ce questionnaire de thèse sur la perception de la ROSP et du forfait-structure par les médecins généralistes. Et malgré notre refus du principe de la ROSP, n’oubliez pas de remplir vos items déclaratifs si vous voulez ne pas perdre ce forfait (ainsi que le forfait-structure) pour l’année passée ; vous avez jusqu’au 4 février.

Et le meilleur : une bonne partie du Focus « Exercice Coordonné » s’est focalisée sur le Paiement à l’Equipe de Professionnels de Santé (PEPS). Le rêve de tout énarque : on nous donne un forfait annuel par patient, à se partager entre professionnels de santé, qui se substitue au paiement à l’acte quoi qu’il arrive au patient. Les objectifs annoncés sont d’améliorer la qualité de vie des soignants (ah bon ?), et de gagner du temps médical en diminuant le nombre d’actes. Bon, c’est sûr qu’avec un forfait annoncé de 64 euros/an pour un patient de 45 ans sans pathologie grave, qui ne couvrira donc même pas une consultation médicale (sauf à aller négocier le couteau entre les dents avec les infirmiers), on serait tenté de fermer les cabinets à partir de septembre. Cerise sur le gâteau, le forfait est diminué si le patient consulte ailleurs. Eh oui, le nomadisme médical, c’est aussi notre faute ! Pour nous appâter, la Caisse nous a présenté l’expérimentation faite depuis 2 ans sur 13 Centres de Santé (sur 350 existants) et 3 Maisons de Santé Pluridisciplinaires (sur 910). Soit 16 structures dont 13 ont arrêté en cours de route car projet pas viable. Convaincant en effet. Pour autant la Fédération des Centres de Santé nous reproche notre refus de ce mode de paiement. Ce à quoi la FMF a répondu que lorsque la rémunération est clairement insuffisante, il est préférable de s’allier plutôt que de s’accuser mutuellement, d’autant que nous libéraux, n’aurons pas de subventions pour pallier nos pertes de revenus liées à ce mode de rémunération (globalement les déficits des Centres de Santé sont estimés de 25 à 50%, selon l’IRDES p.3).

En attendant les propositions de l’Assurance-Maladie, sur lesquelles on ne se fait pas beaucoup d’illusions, nous sommes de plus en plus nombreux à pratiquer des augmentations d’honoraires via les DE largement appliqués. Rejoignez les Comeli, ne restez pas seuls, car sans vergogne, les Caisses envoient des courriers d’intimidation. Je dis sans vergogne, car dans le même temps monsieur Attal annonce un doublement des franchises avec un plafond de 200 euros annuels pour les patients en ALD (pour les autres aucun plafond). Et sur le « MonEspaceSanté » des patients sont affichés les « partenaires », dont des plates-formes commerciales de téléconsultations qui prennent 5 à 10 euros de « frais de dossiers » par consultation, en toute impunité. Alors n’ayez pas honte ni aucune gêne, nos DE n’atteindront jamais 200 euros annuels par patient. Restons fiers d’être médecins, car sinon à force de ne pas nous payer ce que nous valons, nous finirons par ne valoir que ce que nous sommes payés.

Je vous souhaite une bonne semaine.