Chers amis,
Le buzz de la semaine provient d’un amendement voté par les députés en Commission des Affaires Sociales, instituant le conventionnement sélectif. C’est-à-dire qu’un nouveau médecin ne pourra se conventionner en zone surdense qu’après le départ d’un autre. La porteuse de l’amendement, Annie Le Houerou, du Finistère, le justifie par le rapport du Conseil de l’Ordre qui montre qu’il y a un déficit de l’installation en libéral, et notamment une forte érosion de la densité en généralistes. Toujours le vieux fantasme des politiques : empêcher les médecins de poser leur plaque dans l’une des quelques villes côtières qui ne souffrent pas encore de pénurie, permettra de repeupler tout le reste de la France. Cela pourrait prêter à sourire si on n’avait pas quelque inquiétude sur les capacités des députés à calculer les densités. En effet, cette Mme Le Houerou nous explique qu’il lui faut trouver 24 généralistes pour remplacer les 8 partants qui travaillaient 14 heures par jour. Soit elle a du mal avec les chiffres, soit elle estime le temps de travail quotidien d’un jeune médecin à moins de 5 heures par jour. Les jeunes apprécieront … Le Conseil National de l’Ordre (CNOM) a immédiatement réagi en démontrant l’inutilité de la mesure. Reste à voir maintenant si cet amendement va franchir la barrière du vote en séance plénière.
L’autre réaction des politiques, face à la pénurie médicale, est le transfert des consultations sur des para-médicaux, voire des commerçants. Témoin ce décret qui vient de sortir sur la délégation aux opticiens des troubles de la réfraction. Ils ont désormais le droit de modifier une prescription de correction en effectuant eux-mêmes les mesures. Après tout de même une première prescription par l’ophtalmo, et pour une période maxi de 3 ans (1 an chez l’enfant). Ca n’empêche, n’y a t’il pas un petit conflit d’intérêt : soit le patient garde ses lunettes, soit l’opticien décrète que la vue s’est modifiée et qu’il faut confectionner (traduisez « vendre ») une nouvelle paire. La FMF rappelle qu’elle est très favorable à un transfert de tâches vers des collaborateurs, mais à condition que ce soit des professionnels de santé, comme des orthoptistes par exemple, et qu’ils travaillent dans les cabinets médicaux pour assister les médecins. Sans oublier que la première délégation à prévoir est celle des tâches administratives sur un secrétariat physique. Ceci dit, ce décret a une autre dimension, en ce qu’il retire les actes « lucratifs » aux médecins pour les transférer aux vendeurs de lunettes et aux assurances complémentaires qui sont derrière. Mais ensuite, lorsque les ophtalmos auront disparu, qui va soigner les patients ?
J’ai hésité à parler ici de ce courrier reçu par l’une de nos consoeurs, à la « sortie » d’un patient. Au premier abord, on a envie de rire. Mais en fait, il est parfaitement emblématique de la « procédurisation » de la médecine. On y lit que le patient a bien reçu son Plan Personnalisé de Soins (le magique PPS), qu’on lui a bien donné son questionnaire de satisfaction, que le compte-rendu a été rédigé selon les normes en vigueur. Bref, tout a été très bien fait comme il faut. Juste, en simple commentaire, on apprend qu’accessoirement, le patient est décédé durant l’hospitalisation. Pas grave, les procédures ont été respectées, l’établissement sera certifié. On peut se demander au passage comment le patient a rempli son questionnaire de satisfaction ?
Un petit rappel sur les risques de prêter sa carte CPS à vos remplaçants. C’est interdit. Si certaines Caisses sont tolérantes (parce que ça les arrange), d’autres réclament le paiement d’indus aux médecins remplacés. Alors prudence !
Et pour finir en poésie, une conférence va se tenir prochainement à Blois, sur le thème « quelle médecine pour demain » ? Devinez où : à la Maison de la Magie. Cela résume finalement tout ce Point Hebdo …
J’apprends, au moment où je « mets sous presse », que la Convention vient de paraître au J.O. Je vous en parle plus précisément la prochaine fois. Suite au prochain épisode …
Je vous souhaite une belle semaine.