Les juridictions conventionnelles des médecins, une parodie de justice

En matière conventionnelle il y a les commissions dites paritaires CPL, CPR et CPN pour respectivement Commission Paritaire Locale, Régionale et Nationale.

Lorsqu’un directeur de caisse a à se plaindre de l’engagement conventionnel d’un médecin, il peut monter un dossier à charge et saisir la CPL mais cette commission ne juge que sur pièces et sera amenée à entendre le médecin qui peut se faire accompagner d’un avocat ou d’un confrère uniquement si la CPL décide de se réunir en formation « médecins », autrement la commission devra se contenter du dossier monté par la CPAM. Cette 1è instance bafoue ainsi les droits de la défense.

A partir d’un certain niveau de sanction l’appel (ou ce qui est censé le représenter) se fait au national devant la CPN, et la parodie de justice se poursuit également à ce niveau

  • Les représentants de la CPN jugent également sur pièces, c’est-à-dire essentiellement sur un dossier à charge, sans la présence de l’intéressé qui n’a pas la possibilité de s’expliquer ou de se justifier.
  • Mais le plus extraordinaire pour une juridiction d’appel c’est que son avis est uniquement consultatif et que le directeur de la CPAM qui a initié la procédure a tout-à-fait loisir de ne pas suivre celui de la commission d’appel !

Un criminel de droit commun est juridiquement mieux traité qu’un médecin poursuivi devant les instances conventionnelles, ainsi pendant l’instruction il a droit à un avocat et ce dernier à accès à son dossier, en appel il a droit à un nouveau procès, il est présent, peut prendre la parole et bénéficie de l’appui de son défenseur ; enfin la décision de la cour d’appel s’impose et remplace celle de première instance.

Rien de tout cela pour les médecins conventionnés qui subissent une parodie de justice de bout en bout. Et ces « tribunaux d’exception » ne vont pas musarder dans les mois qui viennent avec l’application de l’avenant n° 8 à la convention médicale qui va permettre aux caisses de mettre au pas les derniers des « mohicans », ceux qui avaient encore un espace de liberté, les médecins exerçant en secteur 2 !

Autant de mesures à l’origine de l’hémorragie des médecins en dehors du système libéral conventionnel avec demain pour les français le choix entre pas de médecin ou un médecin hors convention, pour les maires le choix entre pas de médecin ou créer des postes salariés qui leur reviendront trois fois plus chers que les médecins libéraux qu’ils ont poussé hors du système.

Mais il leur faudra bien assumer leurs choix des 3 dernières décennies où dans une fuite en avant schizophrène ils votaient aux parlements les textes les plus liberticides pour la médecine libérale en s’étonnant en revenant « aux champs » de la désertification qui progressivement s’installait. Malheureusement, le jour où les français s’en rendront compte il sera trop tard mais la sanction politique sera surement à la hauteur de leur abandon.

Ainsi, en discussion avec le directeur de mon Agence Régionale de Santé je m’interrogeais sur l’incompétence des responsables ou leur volonté délibérée de détruire la médecine libérale en France ; ce dernier m’assurant du contraire je ne peux que conclure à l’incompétence ou l’absence de vision constructive au delà de l’horizon quinquennal rythmé par les incontournables homologations populaires.

Dr Marcel GARRIGOU-GRANDCHAMP, Lyon 3è CELLULE JURIDIQUE

L’article pouvant intéresser au delà de la sphère des médecins, je l’ai également déposé sur MEDIAPART : ICI