La consultation complexe de déconfinement.

Nous apprenons ce soir 29 mai 2020 par un communiqué du Ministère des Solidarités et de la Santé la création d’une nouvelle consultation complexe, consacrée à l’évaluation des ruptures de soins chez les personnes fragiles pendant la période de confinement.

C’est intéressant mais démontre une nouvelle fois que le Ministère prend ses décisions sans même avertir les principaux acteurs concernés que sont les médecins libéraux.

Mais ne boudons pas notre plaisir. Le Ministère reconnaît ainsi implicitement :

  1. que le confinement peut avoir été dommageable pour le suivi des pathologies chroniques ;
  2. que les médecins libéraux et plus particulièrement les médecins traitants sont les plus à même d’évaluer et de traiter ces carences de suivi ;
  3. et enfin que cette prise en charge complexe justifie une rémunération de consultation complexe.

Alors bien évidemment le communiqué de presse est assez flou sur le public concerné, les modalités de cotation, et le contenu de cette nouvelle consultation complexe.

Il faut pour en savoir plus se référer directement à la source et donc au décret paru le 28 mai 2020 au Journal Officiel.

On y lit : 

Art. 2 sexies.-En application de l’article L. 16-10-1 du code de la sécurité sociale, une consultation complexe réalisée en présence du patient par le médecin traitant, ou tout autre médecin impliqué dans la prise en charge du patient en l’absence de médecin traitant désigné, peut faire l’objet d’un remboursement par l’assurance maladie, par dérogation aux dispositions conventionnelles prises en application de l’article L. 162-1-7, pour les assurés vulnérables au sens du décret du 5 mai 2020 susvisé et les assurés reconnus atteints d’une affectation de longue durée qui remplissent au moins un des critères suivants :

– ne pas avoir eu de consultation avec leur médecin traitant ou tout autre médecin impliqué dans la prise en charge du patient en l’absence de médecin traitant désigné pendant la période d’interdiction de tout déplacement de personne hors de son domicile ;
– avoir été adressé par un établissement de santé en sortie d’hospitalisation.

La participation de l’assuré mentionnée au I de l’article L. 160-13 du même code est supprimée pour cette consultation dont le tarif ne peut donner lieu à dépassement.

Nous avons donc un peu plus d’éléments. Quel est le public ? Le décret du 5 mai 2020 nous donne la réponse :

La vulnérabilité mentionnée au I de l’article 20 de la loi du 25 avril 2020 susvisée répond à l’un des critères suivants :
1° Etre âgé de 65 ans et plus ;
2° Avoir des antécédents (ATCD) cardiovasculaires : hypertension artérielle compliquée (avec complications cardiaques, rénales et vasculo-cérébrales), ATCD d’accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV ;
3° Avoir un diabète non équilibré ou présentant des complications ;
4° Présenter une pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d’une infection virale : (broncho pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d’apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ;
5° Présenter une insuffisance rénale chronique dialysée ;
6° Etre atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
7° Présenter une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2) ;
8° Etre atteint d’une immunodépression congénitale ou acquise :

– médicamenteuse : chimiothérapie anti cancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive ;
– infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3 ;
– consécutive à une greffe d’organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques ;
– liée à une hémopathie maligne en cours de traitement ;

9° Etre atteint de cirrhose au stade B du score de Child Pugh au moins ;
10° Présenter un syndrome drépanocytaire majeur ou ayant un antécédent de splénectomie ;
11° Etre au troisième trimestre de la grossesse.

On y apprend donc aussi que c’est théoriquement réservé au médecin traitant, en présentiel uniquement, et pour des patients n’ayant pas consulté du 16 mars au 11 mai 2020, ou sortant d’hospitalisation, et pris en charge totalement par l’AMO.

Par contre aucune précision sur les modalités de facturation de cette nouvelle consultation complexe et du tiers payant éventuel. Quelle lettre-clé ? quel code d’exonération ?

Le Généraliste qui semble avoir eu droit à des précisions nous informe d’un code PCV, mais on ne retrouve cette information nulle part sur AMELI ce soir, et donc rien non plus sur les modalités pratiques. L’UNCAM a-t-elle seulement été tenue au courant ? Les éditeurs de logiciels ne sont probablement pas non plus avertis, ce qui laisse évidemment présager bien des difficultés la semaine prochaine.

Rien par contre sur le contenu. Nous supposerons donc qu’il s’agit tout bonnement de faire notre travail de suivi, de coordination et de surveillance. Ce que nous aurions tous fait de toute manière.

Mais rêvons un peu : le lundi de Pentecôte n’étant pas un jour férié pour les salariés, nul doute que le Ministère et l’UNCAM vont travailler d’arrache-pied le 1er juin pour aplanir ces petites difficultés techniques.

Et rêvons encore plus  : la prochaine fois que l’avenue de Ségur voudra faire participer les libéraux à la prise en charge des patients de ville, elle prendra soin de les consulter ou au moins de les avertir AVANT. Plutôt que de les laisser le découvrir dans la presse ou par un communiqué du Ministère …


MAJ du 30/05/2020 : j’ai décidément été mauvaise langue … la CNAM travaille le week-end et nous a fourni le 30/05 (bon pour une cotation applicable au 29/05…) le mode d’emploi (fiche CNAM complète à télécharger pour les curieux).

Cette consultation s’applique aux patients non vus en présentiel depuis le 17/03/2020 et est applicable jusqu’au 15/07/2020, y compris aux patients vus en téléconsultation pendant le confinement.

En pratique :

  • Prise en charge : 100% via EXO-DIV 3 (comme les téléconsultations)
  • Tarif : 46€ en métropole et 55,20€ dans les DROM
  • Si logiciel à jour de la FR 200 : facturation du code affiné PCV (transmission directe en facturation du code CCX)
  • Si logiciel non à jour de l’avenant 12 : facturation du code CCX et indication dans le dossier patient du code PCV

Règle de facturation :

  •  Tarif opposable obligatoire
  •  Uniquement en présentiel
  •  Possible en visite avec cumul de la majoration de déplacement (MD) pour les médecins généralistes
  •  Interdiction de cumul avec les majorations d’urgence de la NGAP (article 14)