Démographie médicale libérale: l’aveuglement des responsables

Il y a le constat inquiétant, les installations en médecine libérale plafonnent toutes spécialités confondues à 10% des promotions de médecins formés, soit environ 350 par an alors qu’au cours de la décennie 2010-2020 5 à 6000 médecins partiront à la retraite chaque année, sans compter ceux qui mettent fin à leur exercice libéral pour rejoindre les rangs du salariat.

Cette désaffection pour l’exercice libéral est amorcée depuis les années 80, il n’y a qu’à observer les chiffres communiqués par le CNOM au sujet du mode d’exercice au moment de l’inscription aux tableaux des CDO.

Devant la désertification qui s’annonce et les coûts des soins qui vont exploser (l’exercice salarié coûte 3 fois plus cher) nos parlementaires et même le CNOM font preuve d’une imagination qui ne fera qu’accentuer la fuite vers le salariat et l’intérim représenté par les remplacements :

  • Les « fameuses » maisons pluridisciplinaires resteront des coquilles vides faute de volontaires libéraux sauf à salarier ses médecins avec une conséquence sur les coûts.
  • L’avenant n°20 n’a attiré qu’une cinquantaine de médecins en zone déficitaire en 4 ans ! 
  • La fin de la liberté d’installation régulièrement ramenée au goût du jour par les parlementaires et que le Ministre a pour une fois encore récemment repoussée.
  • La ridicule et contreproductive obligation de déclaration des congés remise au goût du jour par les sénateurs et confirmée par la commission des affaires sociale de l’Assemblée le 30 mars ! Nous attendons avec impatience la teneur des débats en séance publique le 12 avril prochain qui risque de compromettre la mission de « réconciliation » avec les professionnels de santé entreprise par le Ministre Xavier Bertrand en vue des présidentielles.
    • ridicule parce qu’elle est inapplicable, les CDO ne pouvant gérer cette « usine à gaz » imaginée par des politiques vraiment éloignés du terrain et de ses réalités. 
    • contre productive parce qu’il s’agit là d’une mesure vexatoire pour les médecins en exercice et repoussoir à l’installation pour les jeunes.
  • La PDS forcée à coups de réquisitions et poursuites ordinales faisant fi du non volontariat (cf l’affaire TARPIN) -* Bientôt le compagnonnage forcé, cette nouvelle obligation déontologique imaginée par le CNOM pour pallier à la pénurie de volontaires ; dommage que le CNOM ne se soit pas prononcé aussi sur la rémunération devant accompagner cette tâche d’enseignement.

La FMF rappelle une fois de plus que la démographie des médecins libéraux ne se règlera :

  • qu’en permettant aux médecins d’avoir les moyens de travailler avec le même nombre de salariés que partout ailleurs en Europe
  • qu’en facilitant leurs conditions d’exercice :
    • en augmentant leur marge bénéficiaire
    • en mettant fin aux harcèlements des caisses 
    • en mettant fin à la paperasse envahissante qui réduit le temps médical au profit d’un stérile temps administratif,
    • en mettant fin aux réquisitions dans le cadre de la PDS,
  • qu’en sécurisant les conditions d’exercice avec un tiers payant dans les zones sensibles et une ordonnance dématérialisée vers une pharmacie pré-identifiée pour les produits « toxiques » qui était simple à réaliser dans le cadre de la carte SV 2 au lieu d’une inutile impression de photo !
  • qu’en revalorisant massivement la médecine de premier recours dès la faculté en titularisant les professeurs et en créant des stages incitatifs pour les étudiants et leurs tuteurs en situation de responsabilité.

Tout le reste n’est qu’illusion et ne sert qu’à gagner du temps, mais les faits sont têtus et les français se rendront compte, un peu tard, de la disparition de la médecine de proximité qu’ils plébiscitaient tant autrefois avant que des décennies d’irresponsabilité politique ne vienne l’anéantir.


Dr Marcel Garrigou-Grandchamp, 69003 LYON,


UNION GENERALISTE-FMF