Chers amis,
Un dernier Point Hebdo avant de prendre la route pour beaucoup d’entre vous.
Essentiellement pour rappeler aux généralistes que la campagne MSO/MSAP sur les arrêts de travail bat son plein, puisque fidèles à leur habitude, les CPAM envoient massivement fin juillet les notifications de Mise Sous Objectifs (MSO), que vous avez 2 semaines pour contester. Car nous ne vous le répèterons jamais assez, refusez les MSO. Vous serez alors Mis Sous Accord Préalable (MSAP), c’est-à-dire que vous devrez justifier chaque arrêt de travail sur une période donnée, mais au moins vous ne prenez aucun risque. Et accessoirement vous submergerez les services médicaux des CPAM qui craignent cela plus que tout. Pour plus de précaution, je recommande aux médecins ayant reçu le 1er courrier recommandé les alertant de la procédure à leur encontre, d’envoyer un courrier préventif de refus de MSO avant de partir en vacances, même si vous n’avez pas encore reçu la notification officielle de mise sous MSO. Refus qu’il faudra bien-sûr confirmer ensuite, à réception de la notification. Et contactez notre cellule juridique avant d’aller vous expliquer à la CPAM lors d’entretiens qui n’ont rien de confraternels.
J’en profite pour vous donner des nouvelles du feuilleton Loi Mouiller/pacte Bayrou (s’exiler environ 2 jours par mois pour exercer dans un endroit inconnu avec des patients tout autant inconnus). La Ministre du Travail et de la Santé Mme Vautrin, assistée de M. Neuder (Ministre de la Santé et de l’accès aux soins) a présenté le 27 juin la carte des 151 zones « rouges » où nous devrons nous rendre. Eh oui, seulement 151 zones, donc forcément très éloignées de nos lieux habituels d’exercice, ce qui va faire perdre énormément de temps médical en déplacements. Cette cartographie très restrictive a déclenché la colère de nombreux Maires, notamment ceux qui avaient soutenu cette Loi, car ils découvrent que non seulement ils n’en seront pas bénéficiaires, mais en plus ils devront laisser partir leurs maigres médecins, appauvrissant encore un peu plus leurs communes en termes d’accès aux soins. Tel est pris qui croyait prendre … On remarquera que Mme Vautrin explique cette mesure en parlant de solidarité avec les médecins qui ont fait le « sacrifice » d’exercer dans ces lieux, ce qui est une manière très positive de présenter la chose, et que le gouvernement « sait compter sur notre engagement ». Comment lui dire que non, le gouvernement n’a rien compris. Les médecins sont vent debout contre cette Loi et on l’a clairement dit. Nous n’irons nous « sacrifier », puisqu’elle l’appelle ainsi, que contraints et forcés, et pas du tout engagés.
Passons maintenant au feuilleton Dr Junior (4ème année, dite professionnalisante, pour les internes de Médecine Générale). Deux autres réunions ont eu lieu pour sa mise en place, quasiment pour rien. Côté maîtres de stage, le forfait reste à 1200 euros mensuels pour mettre à disposition un cabinet tout équipé, excepté dans les zones sous-denses où il est agrémenté d’une prime de 600 euros (soit 1800 euros en tout). La seule avancée est que cette prime concerne maintenant aussi les ZAC en plus des ZIP. Côté Dr Junior, on leur refuse toujours une rémunération à l’acte, alors que l’objectif est de les initier à l’exercice libéral. Tout au plus pourront-ils recevoir, en complément de leur maigre salaire, une prime de 200 à 500 euros s’ils voient plus de 30 patients par jour, ce qui est totalement surréaliste, et même dangereux pour les patients. Les représentants étudiants ont écrit un communiqué commun pour dire leur opposition, largement entériné par les syndicats séniors dont la FMF évidemment.
Puisqu’on parle de contestation, je vous rappelle que la FMF a manifesté le 1er juillet avec tous les professionnels de santé spoliés par le report des revalorisations prévues ce jour, report lié aux conclusions du Comité d’alerte qui craint un dépassement de l’ONDAM en 2025. Chez les médecins, ce sont surtout les psychiatres, gynécologues, pédiatres, gériatres et médecins MPR qui vont en pâtir. Vu que ces spécialités sont en bas de l’échelle des revenus, la FMF comprendrait très bien que certains d’entre vous appliquent néanmoins les nouveaux tarifs dès maintenant par des compléments d’honoraires remboursables par les complémentaires de santé. Pour cette raison, plus la campagne MSO et les baisses de tarifs annoncées pour les radiologues, la FMF a décidé de suspendre sa participation aux réunions avec la CNAM, puisque manifestement les accords conclus n’ont aucune valeur.
Je pars du principe que vous devez être de bonne humeur en cette période de vacances, alors je vais vous parler du récent rapport de la vénérable Académie de Médecine sur les difficultés d’accès aux soins spécialisés en France. Ils ont trouvé LA solution : rendre l’accès direct aux consultations de 2ème recours, sans passage par le Médecin Traitant. Parce que c’est bien connu, les spécialistes enfilent des perles toute la journée en attendant que les généralistes veulent bien leur adresser quelques patients. Peut-être que si nos académiciens sortaient de leur antre parisien, ils verraient les délais d’attente interminables pour obtenir un RDV spécialisé. Là aussi, les syndicats se sont unis pour protester : non, le passage par le Médecin Traitant n’est pas un handicap pour le patient ; c’est au contraire un formidable outil de régulation qui permet d’optimiser au mieux le temps médical pour des consultations justifiées.
Et comme chacun y va de ses petites propositions pour améliorer l’accès aux soins, la palme revient sans doute à la Commission d’enquête de l’Assemblée Nationale sur l’accès aux soins, qui a pondu un rapport de 188 pages, excusez du peu. Cela partait pourtant bien, avec la constatation que notre système est trop hospitalo-centré. Alors que préconisent nos députés ? Tenez-vous bien, il faudrait que l’hôpital « se transforme pour aller vers plus de soins de proximité », et que les soins de 1er recours deviennent un service public, sur le modèle de l’organisation hospitalière (p.112 du rapport) ! Car nous savons tous que l’hôpital est un étalon en termes d’organisation. C’est pas comme si le gouvernement venait d’annoncer devoir injecter 30 milliards d’euros pour soutenir les hôpitaux déficitaires. Il parait que des travaux sont en cours sur la place à proximité du Parlement, parce qu’on y plante « de l’herbe », ceci expliquant peut-être cela … On notera aussi au passage que les IPA sont recommandés pour éviter « les consultations médicales de routine ». Les médecins apprécieront de savoir qu’ils font un métier « routinier ».
Pendant ce temps, on apprend que le Haut Conseil des Familles a confié à l’agence ASDO la lourde mission de travailler sur le « lexique des personnes âgées ». Comprenez : quels termes utiliser pour désigner nos aïeuls afin d’éviter les discriminations. Combien de réunions et quel coût pour de la sémantique pendant que la Sécurité Sociale se meurt ?
Et pour finir, encore un exemple de décision irrationnelle : la CPAM de l’Yonne a décidé de restreindre l’envoi des TROD angine, en priorisant les cabinets qui l’utilisent peu. Donc si vous êtes un médecin qui en a peu besoin (patientèle âgée, exercice de médecine générale à temps partiel, …) vous pourrez en recevoir beaucoup. Si au contraire vous voyez beaucoup d’enfants, participez au SAS ou consacrez du temps aux soins non programmés, vous serez limités. Sans doute parce que les médecins yonnais abusent des TROD : ils les mangent, ou ils en font 3 par patient pour être bien certains du résultat ?
Petite note optimiste cependant : vous avez vu le nombre de communiqués communs ? Certes, ce ne sont que des communiqués, mais ces mesures, toutes plus lunaires les unes que les autres, auront au moins eu l’avantage de rapprocher les médecins.
Je vous souhaite de très bonnes vacances, loin de ces vicissitudes.