Point-hebdo FMF du 08-01-2023

Chers amis,

Habituellement ce premier Point Hebdo de l’année me sert surtout à vous présenter les vœux de la FMF qui accompagnent les miens, car j’ai souvent peu de choses à dire sur l’actualité professionnelle sur les deux dernières semaines. 2023 est un peu différent …

Vous qui me lisez avez sans doute fait partie des milliers de médecins libéraux venus battre le pavé à Paris (partie du Panthéon, « La Patrie Reconnaissante ») jeudi dernier 5 janvier pour demander d’avoir enfin les moyens d’exercer correctement notre métier. Ce qui passe par une vraie revalorisation de la consultation estimée à 50 euros comme dans les autres pays européens. Pourtant notre cher Ministre François Braun nous l’a dit : « ce n’est pas le moment de faire grève » ; traduction : à l’hôpital ils sont tous en burn-out, malades ou en vacances, alors on compte sur vous pour les remplacer, vous les libéraux toujours sur le pont, jamais malades et qui en plus bossez pour presque rien ! Mme Borne, 1er Ministre a renchéri : « ce n’est pas très responsable » ; là c’est clair, pas besoin de traduction. Et cerise sur le gâteau, Thomas Fatôme, Directeur de la CNAM jeudi matin a bien expliqué : 1/ les syndicats qui appellent à la révolte comptent pour du beurre, on ne négocie pas avec eux  2/ on ne va pas vous donner 1 centime, mais on vous demande de recevoir plus de patients.

Alors mesdames et messieurs nos dirigeants, nous sommes vraiment contrits de vous avoir déplus, mais franchement : qui est le plus irresponsable dans l’histoire ? Les médecins hospitaliers vous disent qu’ils veulent avoir le temps de s’occuper correctement des patients, qu’ils ne supportent plus de les voir passer des journées entières sur des brancards dans les couloirs parfois sans manger ni boire, faute de soignants sur des postes pourtant pourvus financièrement. Que tout irait bien mieux si les libéraux pouvaient prendre en charge une bonne partie de ces patients. Et les libéraux disent banco ! Donnez-nous les moyens de nous délester du travail administratif et de préparation des consultations grâce à des salariés, et nous nous recentrerons sur ce que nous faisons le mieux : de la médecine, en recevant plus de patients sans nuire à la qualité des soins. Et que répond Monsieur Macron dans ses vœux dès le lendemain ? Tout le contraire : vous serez mieux payés à l’hôpital (ce qui manifestement ne fait pas revenir les soignants), et pour vous médecins libéraux on vous promet de donner la médecine aux para-médicaux pour vous recentrer sur l’informatique et les protocoles. Mais enfin Monsieur le Président, vous avez des yeux pour voir et des oreilles pour entendre ??? Au moins ils ont réussi l’exploit de réunir libéraux et hospitaliers, qui ont signé un communiqué commun sous l’égide du Conseil de l’Ordre. Désormais le combat continue mais ensemble. Nous reprenons le travail, mais préparons-nous à des actions au cabinet et ne rangeons pas nos accessoires du parfait manifestant gaulois !

Il faut dire que le gouvernement ne lésine pas sur le poil à gratter ! Nous avons eu le projet de décret concernant les Infirmiers de Pratique Avancée (IPA). Sans surprise nous lisons que ces IPA pourront désormais recevoir les patients, renouveler leurs traitements, les modifier, et même instaurer les traitements pour des pathologies lourdes. Mais de plus, asseyez-vous car c’est un must !, ils pourront primo-prescrire des médicaments que même les médecins traitants n’ont pas le droit de prescrire : nébulisations de béta2agonistes, érythropoïétine, Ac monoclonaux anti-PCSK9 hypolipémiants. Est-ce que ce monde est sérieux ?

Dans un autre domaine, les médecins de Chartres (Eure et Loir), soutenus par leur Conseil Départemental de l’Ordre, ont fait valoir leur droit de retrait sur les gardes. La pénurie de médecins est telle que la Maison Médicale de Garde est devenue un centre de consultations sans rendez-vous. Avec parfois plus de 30 patients à voir en 4 heures de garde. Forcément cela se termine bien souvent en pugilat : agressions des médecins et agressions entre patients. Après scribouillards, nous voici devenus gardiens de la paix. Le Préfet a entendu l’appel à l’aide et envoyé effectivement des policiers pour … réquisitionner les médecins ! Merci de l’aide.

Pendant ce temps, le portail de déclaration pour les indicateurs de la ROSP (Rémunération sur Objectifs de Santé Publique), passage obligé pour toucher la prime correspondante, est toujours fermé. Il faut dire que la Caisse est bien occupée à valider nombre de sociétés purement commerciales (plates-formes de RDV en ligne, sociétés de téléconsultations) pour leur donner accès aux Espaces-Santé des patients. Je vous rassure, pas aux données de santé, mais seulement aux coordonnées personnelles. Pour le moment. Car une fois auréolées de la caution Assurance-Maladie, il leur sera facile de demander aux patients un accès aux dossiers médicaux, pour leur rendre service évidemment. Question : combien ces validations ont-elles été négociées ? Car donner à une entreprise l’accès aux coordonnées personnelles de 65 millions d’assurés sociaux, cela doit se monnayer très très très cher ! De quoi porter la consultation à 50 euros sans problème.

Oups, j’allais partir en oubliant les largesses annoncées par notre Ministre. Vu la situation épidémique exceptionnelle, vous aurez le droit jusqu’au 31 janvier de :

  • Coter 30 SNP par semaine au lieu de 20 (actes de soins non programmés adressés par le 15);
  • Faire autant de téléconsultations que vous voulez, elles ne seront pas comptabilisées dans les 20% autorisées ;
  • Coter VL (60 euros) en EHPAD même si vous n’êtes pas le médecin traitant (mais toujours seulement chez les patients de plus de 80 ans en ALD, et 1 seule fois).

Merci monsieur Braun, je suis sûre que les médecins vous en seront très reconnaissants !

Par-contre, nous avons perdu depuis le 1er janvier la mirobolante prime à l’essence de 4 centimes par visite à domicile, + 1 centime par IK. Sniff …

 

En attendant de nous retrouver pour de nouvelles actions, je vous souhaite une belle semaine.