Petit glissement sémantique…

On dit que :

  • « La santé n’a pas de prix »
  • « La santé n’est pas une marchandise »

Et pourtant…

Si la Santé n’est pas une marchandise petit à petit le soin le devient !

Avant nous étions « Docteur » = Celui qui sait

Puis nous sommes devenus « Médecin » = Celui qui soigne
Et maintenant nous sommes « Professionnel de santé, effecteur de soin » (sic !) autrement dit = Celui qui produit. Peu importe le savoir, peu importe le savoir-faire, l’important est de délivrer une prestation !

Avant vous étiez « malade » = celui qui souffre, qui a besoin d’être soulagé, qui souhaite être guéri

Puis vous êtes devenus « patient » = celui qui attend
Et maintenant vous êtes « usager » = celui qui consomme. Et je n’invente rien, regardez les textes qu’écrivent les gens qui nous gouvernent (ils sont publiés, consultables sur Internet) on parle bien de « représentation des usagers ». Les associations de malades ont suivi le même chemin : « associations de patients » puis « associations d’usagers ».

En somme, on n’a plus besoin d’être malade pour être « usager », ni d’être Docteur pour être « fournisseur de soins » !

Et lorsque vous réalisez tout ça, vous voyez d’un œil nouveau tout ce qui se développe actuellement : Plateformes Internet, prise de RV en ligne, réseaux de soins, mutuelles ; et bientôt les consultations en ligne. N’en doutez pas, la marchandisation de la médecine est en marche. On vous demande déjà de constituer un dossier médical informatique, soi-disant pour mieux vous soigner, on vous parle de « DMP » = Dossier Médical Partagé, mais partagé par qui ? Dans quel but ? Que devient le secret médical ? Demain, ferez-vous confiance à une machine ? Vous risquez d’y être contraint ! Et le contact humain dans tout ça ? « Pas notre problème, circulez, il n’y a rien à voir ! »

Bon, soyez rassurés, je m’efforce de rester un VRAI Docteur qui va recevoir un malade. J’espère qu’après avoir lu ce billet d’humeur, vous saurez éviter d’être un « usager » qui vient voir un « fournisseur de soins », comme on a un « fournisseur d’accès » pour aller sur Internet.

On ne vient pas « chercher une ordonnance », comme on achète un billet de train. On vient chercher une expertise, parce qu’on souffre et qu’on souhaite être soigné correctement, et si possible guérir. Le colloque singulier, cette relation interhumaine intime et si particulière, est fondamentale dans tout acte de soin.

Dr Marc Barthez