La FMF répond à « Terra nova »

Le think tank Terra nova vient de publier un rapport de 100 pages où le bon et le moins bon alternent, démontrant une fois de plus que les brillants technocrates oublient bien souvent que la vie est une maladie mortelle, et que dans le domaine du coût de la santé il y a une dimension difficilement quantifiable : la personne humaine.
Sur un point au moins, Terra Nova a raison : le Médecin de Famille qui consacrait sa vie à ses patients, et qui était sur les routes jour et nuit quasiment toute l’année n’existe plus. 
A l’heure actuelle, un tel médecin termine divorcé, au bord de l’épuisement professionnel, avec pension alimentaire à la clé. Il y a beaucoup plus de suicides chez les médecins qu’à France Télécom, mais on n’en parle pas.
Terra Nova a raison de vouloir mettre de l’ordre dans le maquis des mutuelles et des assurances complémentaires, dont l’excédent chaque année est de 5 milliards d’euros, et dont les cotisations augmentent autant que leurs prestations diminuent ; leurs frais de fonctionnement vont parfois jusqu’à 25%, de leurs recettes. Mais, c’est bien connu, les maux viennent toujours des autres, et là, le responsable est tout trouvé, ce sont les médecins et leurs honoraires libres.
Terra Nova applique ainsi un des principes de base de la logique Shadok : « pour qu’il y ait le moins de mécontents possibles, il faut toujours s’arranger pour taper sur les mêmes »
Terra Nova a raison de souligner l’exemplarité du régime local alsacien. Assis sur une cotisation adaptable au bénéfice ou déficit (actuellement de 1,5 % des salaires), ce régime a des frais de gestion de 1%.
Là où Terra nova se rapprocherait plutôt de Mamie Nova, c’est quand elle prône la disparition du médecin de famille, la généralisation des maisons de santé pluridisciplinaires, et lorsqu’elle réclame davantage d’ETAT dans la gestion de l’assurance maladie.
Les français ont encore en mémoire la dernière intervention de l’ETAT dans le domaine de la santé lors de l’épidémie de grippe H1N1. Les technocrates y ont étalé leur talent dans toute sa splendeur avec le succès que l’on connaît.
Les Maisons de Santé Pluridisciplinaires (MSP) existaient au début du 20° siècle : cela s’appelait les dispensaires ou centre de santé, ils ont tous fermé les uns après les autres pour des raisons budgétaires. Ceux qui subsistent sont tous largement déficitaires. Au tarif opposable de la sécurité sociale, de telles structures ne sont pas viables.
Les MSP pourraient rendre des services ponctuellement si elle étaient portées par des professionnels de santé et non par des élus en mal de réélection, mais elles ne seront pas l’avenir de la santé en France sous peine d’une explosion des coûts, ce qui, en cette période de vache maigre économique, serait rapidement insupportable.
Le médecin de famille, qui est décrit dans le rapport comme « paternaliste, corporatiste », ne serait même plus le coordinateur des soins. Il serait avantageusement remplacé par une prise en charge en réseau et un « décloisonnement » ville hôpital .
On connaît le coût des réseaux déjà mis en place. Ils ont fait la fortune des organismes évaluateurs qui engloutissent plus de 20% des budgets à eux seuls.
La FMF défend depuis toujours une meilleure coordination des soins, et une circulation correcte des informations entre les différents professionnels de santé qui sont amenés à le prendre en charge un patient.
La FMF réclame une responsabilisation du patient vis à vis de l’accès à l’hôpital public.
La FMF juge indispensable une réforme du médicament et des règles qui régissent les mutuelles complémentaires prétendues « à but non lucratif ».
La FMF réclame une réforme des études avec un an d’internat en situation de responsabilité en milieu libéral pour toutes les spécialités, seule à même de redonner de l’attractivité à l’exercice de la médecine « de ville ».
La FMF aurait souhaité une réflexion plus mature de ces problèmes, rappelle qu’elle a déjà fait à maintes fois des propositions concrètes susceptibles d’apporter des solutions et aurait aimé voir aborder ces réflexions dans un tel rapport.