Monsieur le Député, Je vous remercie de votre réponse à mon courriel. Le problème est que si comme vous l’écrivez les professionnels ont bien été auditionnés, manifestement aucun n’a le sentiment d’avoir été entendu. Et nous constatons que nous n’allons toujours pas l’être. Monsieur le Député, n’êtes-vous pas interrogé par la mobilisation des soignants de toutes professions, médecins, infirmiers, chirurgien-dentistes, kinésithérapeutes, etc.. ? Tous demandent le report du vote et une vraie discussion, et aucune revendication financière ne figure dans nos demandes. Avez-vous déjà vu un tel mouvement ? Jamais l’unité des soignants ne s’était réalisée jusqu’ici, et cette loi a réussi à tous les dresser contre elle. Cela devrait interpeller les élus de la République ! Les médecins, dans leur grande majorité beaucoup plus proches de la retraite que de leurs études, ne défendent que les valeurs d’humanité, d’indépendance et d’éthique, qui sont mises à mal par cette loi et les conséquences qu’elle aura. Le report de quelques jours n’aura donc malheureusement pas permis le vrai dialogue que nous demandons toujours. C’est plus qu’une occasion manquée, c’est une erreur. Avec l’application de cette loi, contre laquelle nous continuerons à lutter avec conviction et constance, les patients ne changeraient peut-être pas de médecins, mais ils changeraient de médecine. Nous poursuivrons donc la défense de nos valeurs, non dans notre intérêt mais dans celui des patients. Et chacun de nous est concerné en tant que futur bénéficiaire de soins. Nous, médecins et autres professionnels de santé, ne voulons pas de ce passage d’une médecine humaine et individualisée (je soigne chacun de mes patients « sur mesure ») vers une médecine protocolisée, bornée, administrée, rationnée selon des critères financiers et qui aboutira à du « prêt à soigner » dans lequel le facteur humain sera de plus en plus négligeable. Monsieur le Député, voici 31 ans que je prodigue des soins aux patients. Pensez-vous que je suis un irresponsable incompétent sur le sujet de la santé? Pensez-vous qu’il en est de même pour mes confrères et les autres professionnels de santé, chaque jour au contact de nos concitoyens ? Pensez-vous vraiment que nous nous trompons tous en analysant cette loi comme délétère ? Du fait des attentats nous ne pouvons pas manifester comme nous l’avions prévu. Aussi en appelons-nous à la réflexion individuelle de nos élus, en leur âme et conscience, pour décider d’un moratoire sur cette loi et d’un vrai dialogue avec les médecins et les autres professionnels de santé. Oui, le fonctionnement du système de santé doit être amélioré, mais avec l’expertise des professionnels et certainement pas contre eux. Monsieur le Député, je vous remercie de m’avoir lu et vous souhaite bonne et libre réflexion.