Chers amis,
On reprend nos Points Hebdos dès la rentrée parce qu’il s’est passé pas mal de choses durant cet été. Nos dirigeants ont phosphoré fort pour nous pondre des mesures tortueuses dont ils ont le secret.
Le principal sujet est l’avenir des Dr Junior, 4ᵉ année pour les médecins généralistes, censée être professionnalisante pour les préparer à l’exercice libéral. Les décrets (pour les Dr Junior)/arrêté (pour les maîtres de stage) viennent de paraître le 28 août, après plusieurs réunions de concertation que vous pouvez suivre sur l’Odyssée du Dr Junior. « Concertation » dans le langage gouvernemental, c’est-à-dire « Je vous expose ce que nous comptons faire. Vous n’êtes pas d’accord ? Ah c’est dommage parce que ça va s’appliquer quand même ». Et là, nos dirigeants ont fait très fort, on sent que le soleil a tapé rudement sur les cerveaux. À l’issue d’une réunion au Ministère, les internes nous ont expliqué le dispositif prévu. Les Dr Junior vont facturer les consultations. Ils garderont pour eux la partie Assurance-Complémentaire (mais comment avoir un compte professionnel et un terminal de paiement sans être installé ?). Ils en informeront la faculté qui leur versera le complément en salaire pour atteindre l’indemnité de stage forfaitaire prévue, ou au contraire leur demandera une reversion si le montant dépasse celui du salaire. Lequel salaire sera majoré de 1000 euros si stage en ZIP (Zone d’Intervention Prioritaire). Et cerise sur le gâteau, la Caisse reversera à la fac la part Assurance-Maladie Obligatoire qui servira à payer les internes. Je sens que je vous ai perdus, là. Les internes s’inquiètent à juste titre des délais nécessaires aux multiples calculs et transmissions avant de recevoir leur salaire. Salaire qu’ils auront intérêt à vérifier, quelques erreurs ayant pu se faufiler aux différents passages. Mais non, tout va bien se passer, le Ministère l’assure. Quant aux maitres de stage (MSU), rien n’a changé par-rapport à juin : ils doivent fournir un cabinet équipé contre une indemnisation de 1200 euros mensuels (1800 euros en ZIP et ZAC), et recevront 600 euros par mois pour encadrer les Dr Junior. On n’a pas très bien compris qui verserait l’indemnisation pour le cabinet, et surtout comment la déclarer : le fisc considèrera sans doute qu’il s’agit d’un loyer perçu et donc d’une activité commerciale. Bref, il est probable que peu de MSU tentent leur chance, comme l’avertit la FMF.
On en sait un peu plus sur l’autre sujet principal : le plan d’exercice solidaire (je ne sais plus comment le gouvernement le nomme exactement, moi, je l’appelle « exil professionnel »). Il parait que les cabinets ont été trouvés dans les 151 territoires dans lesquels nous devrons nous exiler quelques jours par mois, ou y effectuer un certain nombre d’actes, ce n’est pas encore très clair en l’absence de textes règlementaires. 70% se trouvent dans des MSP, le restant dans des Centres de santé, quelques-uns dans des cabinets isolés. Ils sont totalement équipés : « ah, il y aura des échographes par exemple ? – Ah non, quand même pas ! — Des ECG ? — Pas toujours. — Une secrétaire ? — Non, mais au moins un assistant médical mutualisé dans la MSP ». Bref, on aura un stétho et un otoscope, ce sera bien assez pour un généraliste. Côté informatique, un agenda de prise de RDV en ligne (le même pour toute la France), Ordigard pour gérer la liste des médecins, et, tenez-vous bien, il nous suffira d’arriver avec notre CPS et de l’introduire dans le lecteur pour avoir accès à tout : logiciel médical, AmeliPro, DMP. La Directrice de Cabinet que j’ai eue au téléphone était en vacances, je pense que ça devait être sur Mars. Quand on voit les difficultés à paramétrer les CPS de nos internes/remplaçants/ ou en Maison Médicale de Garde, on n’y croit pas un instant. Petit bémol : cela ne fonctionnera pas pour les remplaçants ni les retraités. C’est dommage parce que ce sont à peu-près les seuls qui pourraient avoir intérêt à participer au dispositif. Et on recevra 200 euros/jour en plus des actes, mais rien pour les frais de déplacement ou l’hébergement si on doit rester deux jours. Que faire de nos salariés dans nos cabinets en notre absence ? Pas de réponse, chômage technique probablement ? Bon, à ce jour, ça reste parfaitement sur le mode volontaire… tant que les textes ne sont pas parus. Mais menace suprême du Ministère si on n’a pas de volontaires : on aura la Loi Garot !
Le 3ᵉ sujet essentiel de l’été (décidément, il y en a beaucoup) est la violente campagne MSO (Mise Sous Objectif)/MSAP (Mise Sous Accord Préalable) pour les généralistes qui prescrivent « trop » d’arrêts de travail. Tous les médecins qui ont contacté la Cellule Juridique ont évidemment refusé la MSO, certains ont reçu leur avis de MSAP qui va commencer d’ici la fin de l’année. Alors en représailles, la FMF vous propose de se mettre tous en équivalent MSAP. C’est-à-dire qu’à chaque prescription d’arrêt de travail en ligne, on envoie ce petit texte demandant l’approbation du Médecin-Conseil par la messagerie sécurisée (voir tutoriel). Le service médical va vite se retrouver submergé, et si jamais on est visé à la prochaine campagne, on pourra dire que pourtant le Médecin-Conseil a validé nos arrêts.
Puisqu’on parle d’arrêts de travail, vous savez que nous devons utiliser les nouveaux formulaires depuis mars, avec un report en juillet, puis en septembre, car l’imprimeur de la CNAM ne suit pas et n’a pas pu les fournir à tous les médecins. Encore à ce jour, beaucoup n’ont rien reçu. Cela n’a pas empêché la Caisse de communiquer largement sur le refus des anciens formulaires depuis le 1er septembre, ce qui met les médecins non servis en situation de conflit avec les patients sous pression. La N°2 de la CNAM, Mme Cazeneuve m’a affirmé que les CPAM allaient recevoir la consigne d’accepter les anciens formulaires en attendant que la distribution se termine. Attention, nous n’avons droit qu’à 200 exemplaires par an. Ils vont partir vite lorsque, pour plein de raisons, nous ne pouvons pas les prescrire en ligne.
Pour toutes ces raisons, un Collectif nommé « Santé en danger » appelle à une « marche blanche » le 4 octobre : départ du Panthéon à 14H en direction du Ministère de la Santé. Je vous communique l’information, mais à ce jour la FMF ne s’y associe pas, car les revendications restent floues : « arrêtez de raboter la Santé » et semblent ne concerner que peu la médecine libérale.
Je termine par un décret paru le 14 août qui concerne les médecins retraités actifs : pour l’année 2025, l’exonération des cotisations CARMF atteint 70 000 euros de chiffre d’affaires, mais attention seulement pour les médecins exerçant en ZIP.
Voilà pour bien commencer la rentrée.
À très bientôt !