URSSAF : histoire de maltraitance ordinaire

A l’heure où les médias parlent régulièrement de la maltraitance des médecins envers leurs patients, la maltraitance des institutions envers les médecins libéraux (ou les libéraux de façon plus large) reste elle le plus souvent ignorée.

Et pourtant elle existe. Au jour le jour. Mais tout le monde s’en fout.

Histoire édifiante et exemplaire que subit une de nos jeunes consœurs martiniquaise.
Elle s’installe en 2013. Paye ses factures, ses charges, travaille, fonde une famille. Tout va bien.

Et puis en 2019 l’URSSAF lui envoie des notifications de régularisation de cotisation astronomiques. Et répétées.

Pour quelle raison ? une bête erreur d’inscription sur les fichiers URSSAF en secteur II au lieu de secteur I.
La cause est rapidement identifiée, et donc la logique et le bon sens voudraient que ce soit rapidement corrigé et que les choses rentrent dans l’ordre. Sauf qu’on parle de l’URSSAF. La bête noire des libéraux.

Sauf qu’au lieu de corriger le dossier, l’URSSAF en crée un autre. Egalement erroné.

Et donc rien ne bouge, les notifications et les recommandés continuent d’arriver, les huissiers sonnent à la porte.

Une première procédure judiciaire au tribunal administratif en 2021 aboutit à la condamnation de l’URSSAF.

Rien ne se passe.

Puis une seconde procédure aboutit à une obligation de mise en œuvre du jugement.

Mais toujours rien.

Et cerise sur le gâteau, notre consœur n’étant pas considérée à jour de ses cotisations sociales n’a plus le droit de bénéficier des dispositions Madelin, ou de l’indemnisation des arrêts de travail. Elle s’endette et s’épuise en procédures et sous la charge mentale.

En désespoir de cause, avant de déplaquer, de partir ou de se suicider, elle lance une bouteille à la mer et écrit au Président de la République.

Mais pourquoi donc une telle cascade de dysfonctionnements ?

Parce que tout le monde s’en fout !

  • Il y a eu une première erreur de secteur conventionnel (erreur fréquente d’ailleurs, ma femme par exemple en a fait les frais il y a 25 ans, j’ai mis deux heures à le faire admettre à l’URSSAF au téléphone et deux ans à être remboursé) ;
  • Les services de recouvrement et d’établissement des factures URSSAF sont séparés ;
  • Il est impossible désormais de joindre la personne en charge du dossier par téléphone ;
  • « Par souci de simplicité », toutes les URSSAF des DROM sont regroupées à La Réunion … à 13000 km de la Martinique et 8 h de décalage horaire ;
  • Personne n’a de responsabilité individuelle et donc tout le monde s’en fout : si l’astreinte de non exécution du jugement était prélevée sur le salaire du directeur de l’URSSAF il y a longtemps que ce serait réglé ;
  • Les autorités de « tutelle » (que j’ai ce terme en horreur ! nous ne sommes pas sous tutelle) sont plus préoccupées de leur avancement que de faire respecter le droit et la justice.

Alors faudra-t-il un drame pour que le Ministre de la Santé ou le Ministre des Comptes Publics, tous deux en charge de l’URSSAF, donnent des instructions claires ?

Mme le Ministre Agnès Firmin Le Bodo a lancé une « grande action en faveur de la santé des soignants ». Mais s’occuper de leurs conditions de travail au jour le jour serait bien plus utile !

Si rien ne bouge malgré cet appel, nous aurons la preuve que, malgré toutes les bonnes paroles, en fait tout le monde se fout des médecins libéraux en France. Sauf les médecins libéraux eux-mêmes, mais ils seront alors bien seuls.