Ne faisons pas les frais de la suppression annoncée du RSI & du régime étudiant

C’est annoncé, le RSI et le régime étudiant vivent leurs derniers mois. Le premier doit disparaître au 01/01/2018, le second à la rentrée de septembre 2018. 

Les médecins seront doublement concernés, comme assurés et comme soignants, et ne doivent pas faire les frais de cette réforme. 

Toutes les questions qui se posent au 01/01/2018 pour le RSI se reposeront évidemment aussi au 01/10/2018 pour les régimes étudiant.

Les conséquences pour les médecins assurés. 

La plupart des médecins Secteur II sont affiliés au RSI. À ce titre ils cotisent au taux de 6,50% pour toute leur activité, y compris pour la part des honoraires correspondant aux « Dépassements d’honoraires » qu’il serait d’ailleurs préférable d’appeler « Compléments d’honoraires ». 

Leurs confrères Secteur II affiliés dès à présent à la CPAM cotisent eux à hauteur de 6,50% sur toute leur activité, plus une taxe additionnelle de 3,25% sur leurs dépassements. Les médecins secteur I sont d’ailleurs assujettis à ce même taux de 9,75% pour leurs DE ou leurs activités non conventionnées (parmi lesquelles le DPC ou la maîtrise de stage !!!). 

Alors que va-t-il se passer au premier janvier 2018 ?

les anciens assurés du RSI vont-ils voir leurs cotisations augmenter autoritairement ? Ou allons-nous assister à la coexistence de 2 catégories des médecins, au mépris de l’égalité républicaine ?

Le plus juste serait d’aligner tout le monde sur le taux unique de 6,50% et de supprimer cette taxe inique additionnelle de 3,25%. Mais ne rêvons pas, elle est déjà maintenue dans le PLFSS 2018 à l’article L. 722-4. 

Et se greffe sur cette première question celle toute aussi épineuse de la diminution annoncée des cotisations sociales en compensation de la CSG, dont les arbitrages ne sont toujours pas clairs fin octobre 2017.

Les conséquences pour les médecins soignants.

Là c’est au niveau du travail administratif supplémentaire que les médecins risquent de payer le changement de régime. 

En effet plusieurs millions d’assurés vont subitement être rattachés à la CPAM, dont un certain nombre sont en ALD ou en CMU. Qu’est-ce qui peut « coincer » ? Tout, ou presque …

La télétransmission : les cartes vitales

Le plus simple serait évidemment que les assurés gardent leurs cartes vitales et que ces dernières soient simplement mises à jour. Déjà cette opération simultanée de mise àjour de plusieurs millions de cartes vitales serait probablement compliquée, mais encore bien trop simple. En France, changement de régime AMO implique changement de carte vitale … et on sait que les délais sont (trop) longs, déjà en temps normal. En janvier, ça va bouchonner.

Pas question que les médecins ou les autres professionnels de santé soient pénalisés par une chute de leur taux de télétransmission dans ce cas. Rappelons que la télétransmission est une obligation conventionnelle et que le forfait structure dépend d’un taux de télétransmission d’au moins 66% des actes.

Les tiers payants

Deux aspects dans ce volet.

D’une part les patients en CMU ou en ACS. Normalement ça ne dépend QUE du revenu des patients ; le fait de changer de régime AMO ne modifiant pas leurs revenus, il faut obtenir absolument que le transfert chez la CPAM soit totalement transparent à ce niveau, sans obliger les patients à refaire des dossiers de demande de prestations.

D’autre part, le 1er janvier 2018, nous serons théoriquement dans l’ère du Tiers Payant obligatoire AMO généralisé, puisque ce dernier doit intervenir au 1er décembre 2017. Certes le gouvernement a annoncé un report de l’obligation, à la suite du rapport de l’IGAS qui juge les conditions techniques non réunies au 22/10/2017, mais l’article 83 de la loi de santé de Marisol Touraine n’a pas été supprimé pour autant.

Alors certes la loi et l’article 59 obligent normalement les caisses à honorer les TP même si les cartes vitales ne sont pas à jour, mais comment obliger à payer un régime qui n’existera plus ? Il faut aussi à ce niveau obtenir des engagements fermes de la CNAMTS et des tutelles.

Et sur ce point on retrouve la problématique précédente : le TP AMO qui reste relativement gérable en télétransmission ne l’est plus du tout s’il faut utiliser des feuilles de soins papier. Au mieux les médecins seront payés avec retard, au pire ils ne le seront pas du tout. Et pour les patients, on risque de voir apparaître des renoncements aux soins faute de prise en charge correcte.

La transmission des droits

Depuis le Décret n° 2012-380 du 19 mars 2012, le changement de régime d’AMO est théoriquement sans incidence sur le maintien des ALD en cours …

Lors d’un changement d’organisme d’assurance maladie du fait d’un changement de département ou de régime d’affiliation, les assurés bénéficiant d’une exonération du ticket modérateur (par exemple, au titre d’une affection de longue durée ― ALD ― ou d’une prise en charge post-ALD) devaient jusqu’ici réitérer leur demande d’exonération auprès de leur nouvel organisme gestionnaire, ce qui constituait une procédure lourde et faisait courir un risque de rupture de droits pour les intéressés.
Le présent décret met fin à cette situation en prévoyant que le changement d’organisme gestionnaire est désormais sans incidence sur l’exonération dont bénéficie un assuré pendant toute la durée initialement prévue pour celle-ci.

Dans les faits nous en avons tous fait l’expérience, on nous demande le plus souvent de refaire le dossier de demande d’ALD. Même avec la procédure simplifiée et les services en ligne, c’est totalement inenvisageable pour plusieurs millions d’assurés. Il faut donc être aussi très ferme sur ce point et obtenir l’assurance de la CNAMTS que la procédure légale (c’est à eux de faire le travail) sera respectée.

De même le changement de régime AMO ne modifie en rien le fait qu’un patient a déclaré un Médecin traitant. Pas question de refaire non plus les Déclarations de Médecin Traitant.

Le paiement des FMT, RMT et MPA.

Le paiement de ces différents forfaits ou majorations intervient normalement 2 trimestres APRÈS la date où ils sont comptabilisés.

C’est à dire qu’en 2018 il restera aux médecins à toucher le 3ème trimestre 2017 au 1er trimestre 2018, et le 4ème trimestre 2017 au 2ème trimestre 2018. Comment ces paiements interviendront-ils alors que le régime qui les sert aura disparu ?

On peut d’ailleurs élargir cette questions à tous les régimes. En effet la MPA disparaît pour les médecins traitants au 31/12/2017, et les FMT et RMT sont refondus en un seul paiement global annuel en fonction de la patientèle déclarée au 31/12 de l’année précédente. Il ne faudrait pas que cette réforme fasse oublier aux différents régimes AMO les sommes dues au titre des 3ème et 4ème trimestres 2017.

En conclusion

Les autorités de tutelle ont décidé la disparition de certains régimes d’AMO. Ce n’est pas aux médecins libéraux d’en supporter les conséquences, qu’elles soient financières ou en terme de surcroît de travail.

La FMF y sera attentive et demandera à la CNAM d’appliquer scrupuleusement la régementation qui la contraint.