Le CSTM : Contrat de Solidarité Territorial Médecin

La CNAM aime les « contrats » aux noms ronflants qui vont solutionner définitivement les déserts médicaux.

Aujourd’hui retour sur le CSTM : Contrat de Solidarité Territorial Médecin

Il s’agit d’un contrat tripartite signé entre le médecin, la CPAM et l’ARS.
Son objectif : favoriser l’intervention ponctuelle de médecins conventionnés (toutes spécialités, tous secteurs d’exercice) dans les zones identifiées par les ARS comme « fragiles » pour répondre aux besoins en offre de soins des patients.

Sauf que :

  • 1er écueil : le médecin renfort doit être installé hors d’une zone identifiée « fragile ».
  • 2ème écueil : le médecin renfort doit exercer au minimum dix jours par an en zone « fragile ».
  • 3ème écueil : le médecin renfort doit demander un RPPS spécifique pour la-dite zone et doit facturer l’activité réalisée au sein de cette zone sous ce numéro de facturant « alternatif ».
  • 4ème écueil : le médecin renfort se déplace vers une zone « fragile », donc se lève plus tôt, finit plus tard, passe du temps dans les transports et avance les frais de transports.
  • 5ème écueil : les frais du cabinet principal continue de tourner sans activité en l’absence de collaborateur, le médecin ne pouvant se faire remplacer s’il exerce en libéral.
  • 6ème écueil : encore un plafond à 20 000 €/an pour éviter les effets d’aubaine afin d’éviter que les médecins ne pensent qu’à profiter du système et à gagner toujours plus d’argent.
  • 7ème écueil : contrat non cumulable avec le CAIM, COSCOM, ou autre Option démographique.

Cela vous parait plutôt dissuasif au premier abord ? Curieux, ce contrat n’est pas très séduisant …

Un vendeur de voiture ne vous dit pas que le modèle qu’il veut vous vendre n’avance pas, consomme beaucoup et fait beaucoup de bruit, sinon vous ne l’achèteriez pas.

Vous vous dites alors que devant tant de contraintes, le contrat prévoit certainement une franche incitation et une vraie valorisation pour assurer son succès ! Et bien non, ce n’est même pas intéressant financièrement…

Initialement le bonus était de 10% des consultations et le remboursement des frais de transport. Ce qui pour 10 jours à 30 CS (+MPC+MCS) correspondait à … 30 CS (+MPC+MCS), donc loin du pactole.

Déçus du peu d’engouement pour le dispositif (14 CSTM signés en Bretagne en 4 ans), ARS et CNAM ont alors apporté 2 modifications.

  1. Assurer au moins 10 jours par an au lieu de 20 ;
  2. et 20% de bonus au lieu de 10%.

Mais les freins sont encore une fois mal identifiés. Décidément, faute d’exercer sur le terrain et probablement faute de simplement demander aux médecins ce qu’ils souhaiteraient être mis en place, on prend de mauvaises décisions pour répondre pourtant à de vrais problèmes. 

Ou se trouve le problème me direz-vous ? Où se cache le loup ?

Le montant de l’aide versée est calculé au terme de chaque année civile (le cas échéant, au prorata de la date d’adhésion du médecin au contrat au cours de ladite année). Mais le versement des sommes n’intervient qu’au second trimestre de l’année civile suivante.

En clair, je commence à travailler en janvier 2020 mais je ne toucherai la revalorisation qu’en mai 2021, 15 mois plus tard.

La perte de revenus consentie par un médecin pour aller prêter main forte sur un secteur en difficulté ne sera compensée que 15 mois plus tard. 15 mois !!! Juste inadmissible. Qui accepterait d’être payé 15 mois après avoir débuté son travail ? Le Directeur de la CNAM ?

Je demande depuis 4 ans que ce contrat mal fagoté soit réécrit et adapté. J’ai demandé à mon ARS départementale, sans succès, qui me conseille de m’adresser à la CPAM. J’ai demandé à ma CPAM, sans succès, qui me dit que c’est national, il faut solliciter la CNAM. J’ai sollicité la CNAM (Nicolas REVEL), sans succès, il faut à priori s’adresser en local. J’ai réessayé en local, sans succès. Enfin si, une idée ! Financer le manque à gagner des consultations délocalisées par la CPTS !!!

Et s’il n’y a pas de CPTS ?… 


Comment pourrait-on réécrire ce contrat qui partait pourtant d’une bonne intention :

  • Le médecin se déplace en zone « fragile » pour réaliser une journée de consultation en renfort, la CPAM lui verse une astreinte de déplacement de 100 euros.
  • Le médecin utilise son numéro RPPS habituel, il facture GS + CST = 25 + 15€, avec une valorisation directe de 15 euros.
  • Le médecin peut se faire remplacer sur son cabinet principal alors qu’il est en renfort sur une zone « fragile ».
  • Pas de nombre de jours minimum, pas de plafond. Il est temps de libérer le soin et de faire confiance aux professionnels de terrain.

Rien ne bouge, ce CSTM reste tel quel. Comme si un modèle de voiture restait invendu et que le constructeur insistait à le proposer à la vente… N’importe quel industriel réagirait rapidement dans un souci d’efficience et de rentabilité. Pas la CNAM !
Malheureusement, le pire, c’est qu’il n’y a pas que le CSTM …

Le PTMG
Censé soutenir les médecins qui s’installent dans les déserts médicaux s’ils ne gagnent pas assez d’argent ! Alors même que le zonage précise le contraire. Les médecins installés en déserts ont les activités et donc les revenus les plus importants. Je n’aborde même pas le côté usine à gaz où il faut rendre des comptes très régulièrement sur son activité pour ne pas toucher une hypothétique aide financière. Le seul intérêt reste la meilleure prise en charge des grossesses.

Le CAIM
Il n’est possible que pour les primo-installés. Dommage. Pourtant dans un désert médical où il n’y a plus rien ni personne, il serait intéressant d’installer un médecin âgé, avec de l’expérience, capable de résoudre des situations complexes sans examens complémentaires ni médecins spécialistes à portée de main.

L’Option démographique
Elle ne revalorisait de 10% que les G et VG concernant les patients qui résident sur le lieu d’exercice ! Pratique lorsque l’on exerce dans une zone démographique touristique en tension pendant l’été par exemple …
Et depuis la convention 2016, elle est remplacée par le COSCOM, qui a bonnement supprimé cette part variable.

Bref … Beaucoup de palabres, pour peu de résultat concret finalement.
L’offre de soins se restreint, 6 millions de français n’ont plus de médecin traitant, les urgences explosent. Et les propositions récentes faites par la caisse ne sont pas faites pour nous rassurer : soins non programmés, SAS, CPTS, assistants médicaux. Quand comprendront-ils qu’il faut un vrai choc pour redonner confiance aux médecins, afin qu’ils s’installent et retravaillent en toute sérénité ?
Pour cela il faudra absolument les écouter, les comprendre, les aider, leur faire confiance.

Dr Stéphane PINARD
Président de la FMF UG